Interview de Ronan Boussicaud, co-auteur avec Antoine Dupin de « La marque face aux bad buzz »

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Il y a 4 mois, sortait le livre “La marque face aux bad buzz” aux éditions Kawa – co-écrit entre Antoine Dupin et Ronan Boussicaud.

 

Culture RP a interviewé l’un des deux auteurs.

 

Quatre mois se sont écoulés depuis la sortie du livre, pouvez-vous en tirer un premier retour pour ce sujet ainsi que pour vous-même?

Et oui déjà quatre mois se sont écoulés, pourtant le souvenir des nuits réchauffées par l’ordinateur sur mes genoux ne me semble pas si éloigné. Le livre ne se vend visiblement pas trop mal puisqu’une réédition a été publiée il y a peu. Le plan promotionnel a pas mal fonctionné, et a permis au livre de se faire connaître hors des points de ventes physiques (FNAC et Cie) ou autres librairies grâce à des articles de blogueurs influents, et ce dans un domaine très précis. Nous avions également organisé un jeu concours avec Flavien Chantrel,

« aliaz » le @moderateur (que l’on remercie !).

Sur le plan plus personnel, j’avoue que ce livre me sert vraiment de carte de visite. Il me permet d’être véritablement légitime sur le domaine et d’intervenir sur la thématique de la gestion de crise lors de salons, de conférences et d’ateliers pratiques. Il me permet même de participer à des manifestations de qualité, à la Cantine Silicon Sentier il y a peu, et au Palais des Congrès de

Paris très prochainement. En bonus, il m’aide à faire connaître l’agence web Useweb au-delà de notre périmètre local. Je dois avouer que mon patron est content de mentionner à nos clients qu’un de ses salariés est « auteur »;) ! Pour ma part, après avoir eu une grande appétence à l’idée de rédiger un ouvrage, je dois bien confesser qu’étrangement, c’est comme-ci ce n’était pas vraiment moi qui l’avais écris (pourtant c’est le cas, je vous rassure :P).

Bref, un gain de visibilité et de crédibilité dans mon travail.

La grande force de votre ouvrage réside dans son approche novatrice au travers de concepts liés à la communication, mais également à la psychologie, pourriez-vous nous parler d’un cas qui vous a le plus intéressé ?

C’était précisément l’idée de départ de notre démarche avec Antoine. Les buzz et bad buzz sont des succès populaires inhérents à des mécanismes psychologiques variés et complexes qui méritent d’être connus. Sur le web social, la conception, l’application et la gestion d’une campagne reposent essentiellement sur des problématiques sociales et cognitives (attentes à un moment T, rumeurs, réception d’un message, normalisation du partage, sociabilisation dans les échanges, mémoires collectives…). Le but de cet ouvrage résidait donc non seulement dans l’approche communicationnelle pour gérer une crise sur les médias sociaux, mais également dans l’analyse intrinsèque d’un bad buzz et la compréhension des thématiques fondamentales de la sociabilité du web pour savoir anticiper ces faux pas.

L’exemple type serait celui de Cuisinella, une marque qui revendique un aspect impertinent. En sortant une publicité sur le net très « borderline », les internautes ont massivement rejeté ce spot en hurlant au scandale. Il faut dire que mettre des gens vivants dans des cercueils, tout ça pour montrer qu’il n’est jamais trop tard pour profiter d’une promotion « made in » Cuisinella, il y a de quoi se poser des questions et matière à alimenter les blogs. Après explications de la PDG (là encore, Internet permet aux entreprises de communiquer en retour), on s’aperçoit qu’à force de vouloir trop plaire et de provoquer des émotions fortes, on peut finir par se mettre les gens à dos. À trop vouloir chercher à choquer pour générer du buzz, on en oubli parfois l’essentiel, l’appréciation du public.

Quand bien même, la bonne volonté ne transparaît pas toujours comme on le souhaite.

Il a bien d’autres exemples dans le livre, et de nouveaux depuis sa publication. Pour faire une session de rattrapage, je vous propose de jeter un œil à la présentation qui reprend les idées principales du livre;) !

Pourquoi pensez-vous que le sujet du bad buzz représente souvent une dérive de l’identité de la marque ?

Parce qu’à mon sens, jamais dans l’histoire de la communication, les marques n’ont été aussi exposées, et donc aussi dépendantes des retours des prospects et clients. Les entreprises ne sont plus sur un piédestal et elles comprennent tout juste que le pouvoir est dans la main des internautes. C’est pourquoi on note la prédominance de termes collaboratifs comme le « crowdsourcing », le « crowdfunding », etc. Pas facile de ne pas se faire passer pour Jean-Claude Van Damme lorsque vous parlez à un client avec ces anglicismes barbares:P !

Outre les commentaires désobligeants qui peuvent émerger sur ce catalyseur numérique, Internet agit surtout comme un baromètre cardiaque pour la réputation numérique de la marque. Une réputation qui repose dorénavant sur un algorithme complexe où le capital sympathie joue une place prépondérante.

La force des bad buzz repose également sur la désacralisation des entreprises. Lorsque la viralité est à son apogée, la marque passe parfois en second plan, là où l’information vit par elle-même. La marque devient un acteur anthropomorphique friable, avec ses forces et des faiblesses, une personnalité en difficulté qui perd momentanément le contrôle de son identité.

Quels sont dès lors, les moyens de communication, humains afin de remédier à ce mauvais positionnement de marque ?

Si les internautes ont pléthore d’outils pour s’exprimer, s’insurger, se regrouper et défendre leur point de vue, il ne faut pas oublier que les marques ont à leur disposition la même caisse à outils.
Après, il est de leur devoir de mettre les mains dans le cambouis pour surveiller ce qui se dit d’elles, mais également d’amorcer en interne des réflexions pour savoir comment anticiper et réagir face à des situations épineuses.

La marque a dès lors, un arsenal bien garnis pour reprendre le contrôle de son e-reputation :

  • Un communiqué de presse
  • Une interview du responsable
  • Une vidéo
  • Un article d’explication
  • Un blog d’échange

Mais au delà des outils, il ne faut surtout pas négliger les objectifs qui s’y cachent. Car ce sont bien les objectifs qui légitiment les outils, et pas l’inverse. Une marque peut alors adopter plusieurs types de positionnement :

  • le dialogue
  • le silence
  • le bruit
  • la modération
  • les promesses

Afin de panser les plaies, il est évidemment plus facile de réaliser ces tâches lorsqu’un community manager ou un responsable marketing est au fait de ces stratégies de sortie de crise. Toutefois, l’essentiel réside surtout dans la prise de conscience des responsables de l’entreprise pour prévenir au lieu de guérir. Une analyse des faiblesses de la société, de ses produits ou services permettra à coup sûr d’être davantage réactif en cas de pépin.

Le seul bémol serait l’impact des médias traditionnels. Par exemple, si la télévision s’empare de l’affaire pour évoquer le bad buzz, la marque aura fort à faire pour désengorger rapidement ce second effet Kiss Cool.

Ne sommes-nous pas rentrés dans un cycle du web social trop émotionnel avec pour principale motivation des internautes de « pourrir » une marque ?

En effet, au vu de la prolifération des « bad buzz » en tout genre (qui n’en sont pas forcément d’ailleurs), on peut se poser la question de savoir si les internautes ne son pas trop à fleur de peau.
Le web agit aujourd’hui comme un inconscient collectif détaché de toute pression, libre et décomplexée, ce qui nous semble plus objectif qu’un discours corporate. Or Internet est aussi le vivier d’allégations et d’élucubrations divers et variées, ce qui rend les informations peu vérifiables pour le commun des mortels. Peu importe, ce qui compte le plus souvent, c’est le succès d’une information, et non sa véracité (qu’on ne cherche pas spécialement à vérifier).

Ce qu’il faut savoir, c’est que parallèlement aux agissements des marques cohabitent des communautés très inspirées qui forment une vraie culture web du lol (avec en allégorie de fond les fameux trolls). Une société anarchique ou les détournements d’images, les rumeurs et les mèmes régissent l’attention des internautes lambdas. Si bien qu’à partir d’une erreur de marque, tout un processus peut s’enclencher pour nourrir le bad buzz (qui pouvait ne pas en être un auparavant) et agir comme un amplificateur émotionnel.

Les « vraies » crises émotionnelles sont plus rares, mais véritablement problématiques car elles sont souvent celles qui voient l’activisme des internautes les plus vociférants et nocifs à terme. Un contexte social sensible (chômage, guerre, etc.), un scandale sanitaire ou hospitalier, et c’est un bruit sourd qui marche sur la société face à la polémique.
Pensez à l’affaire Spanghero… Ici, on touche au domaine de la santé et de la sécurité, qui sont les fondements même de notre existence (une pensée à Maslow). Comme souvent dans ces situations, dès qu’il y a soif de justice et de réparation, il faut trouver un bouc émissaire qui payera pour tous les autres. Remarquez, nous nous sommes améliorés, il n’y a plus de guillotine au 21ème siècle, juste des trending topics disgracieux et des moteurs de recherche colporteurs de mauvaises nouvelles.

Ces crises émotionnelles sont presque les seules à avoir un réel impact sur la santé financière de l’entreprise. Pour la plupart d’entre elles, les marques ne sont que des noms sur les tabloïds du moment.

Sur votre blog Psyché du web social vous indiquez de nombreuses bibliographies, des documents sous slideshare, le phénomène devient-il tellement présent qu’il devient difficile d’en faire une synthèse?

Le web est une bibliothèque à ciel ouvert, où il fait bon arpenter les allées de blogs et de sites d’avis pour s’y perdre. La littérature numérique est foisonnante, et il n’est pas rare que votre secteur d’activité regorge d’ouvrages de qualité. Dans mon blog « La psyché du web social », j’use (j’abuse ?) très souvent de références, car elles représentent pour moi le prolongement de mon discours. Si je parle d’une étude qui a été menée, je vais la synthétiser en quelques ligne pour ne pas perdre le lecteur et lui donner la possibilité d’en apprendre plus, à travers une source pertinente. Si je traite d’un terme complexe, peu connu ou galvaudé, je vais proposer un lien vers une définition à laquelle je crois.
Les références que j’utilise sur mon blog insistent surtout sur le fait que malgré mon discours, d’autres que moi ont traité des sujets similaires, et que s’instruire à travers différents interlocuteurs autour d’un même sujet représente une initiative captivante pour éviter le phénomène de la pensée unique.

Comment envisagez-vous le web social de demain?

Avec le 3.0 qui sort déjà le bout de son nez, on peut imaginer que le web de demain sera un web plus « intelligent », dans le sens où il nous donnera des informations annexes à notre requête, en fonction de nos aspirations, intérêts et sites favoris. Déjà, si vous tapez « Marie Curie » sur Google, vous vous apercevrez à la droite de votre écran que Google rassemble tout un tas d’informations sur cette simple requête ( date de naissance, prix, recherches associées…).

Pour une marque, on peut donc imaginer qu’un profil standard s’affiche dans les SERPs dès lors que le nom de la société est tapée sur Google. Un encart ou les informations les plus populaires et les plus récentes s’agrègent directement sans que nous les ayons cherchées. Car plus le web évoluera, et plus l’information viendra à nos oreilles sans que nous l’ayons cherchée, ce qui amplifiera potentiellement la portée et la viralité des informations. Ce qui peut être salutaire et/ou préjudiciable. Nous n’en sommes qu’à un début, surtout avec la corrélation mobinautes/objets connectés…

Dans ce cas, il apparaît primordiales pour les entreprises de prendre conscience que leur image, et surtout leur réputation numérique mérite d’être suivie et maîtrisée.

Le lien vers Amazon pour acheter le livre 😉

Un grand merci à Culture RP pour cette interview.

Un petit rayon de Com'

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