On vit une période révolutionnaire, comparable dans une certaine mesure à l’invention de l’imprimerie

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Culture RP a rencontré Cécile Deffontaines, journaliste rédactrice à l’Obs.

Cécile Deffontaines pour Culture RP

Pouvez-vous nous raconter votre parcours en quelques mots ?

Après une prépa Sciences Po, j’ai intégré Sciences Po Lille puis j’ai fait l’Ecole Supérieure de Journalisme de Lille (ESJ), qui est la plus vieille école de France (90 ans !) en la matière. Elle nous forme à tous les métiers du journalisme : audiovisuel, agence, écriture, montage, etc. J’ai choisi de me spécialiser en presse écrite. A ma sortie en 2001, j’ai envoyé une candidature à TéléObs, le supplément télé-ciné du Nouvel Observateur. Le rédacteur en chef a accepté de me prendre en stage. J’ai ensuite obtenu un CDD, suivi d’un CDI. J’étais très attachée au Nouvel Obs car je lisais ce journal depuis l’âge de 15 ans, et c’est ce qui m’a donné envie de faire ce métier. Donc intégrer TéléObs, c’est un rêve qui se réalisait ! J’y ai passé dix ans, à faire des critiques de programmes TV (reportages, documentaires, fictions), des portraits de comédiens, de réalisateurs, de gens du PAF (ex : Christophe Hondelatte, Charlotte Gainsbourg, Michel Denisot), des reportages sur des tournages… J’ai donc eu l’occasion de toucher à tous les genres rédactionnels : critique, portrait, interview, reportage, article de fond. Puis j’ai basculé au service « Société » de L’Obs. Je suis aujourd’hui chargée, notamment, des questions de tendance, des sujets qui animent la société, qui sont dans l’air du temps. Ces trois dernières années, j’ai couvert des sujets très variés, de l’affaire Merah à l’intersexuation, en passant par le scandale des pilules de troisième et quatrième générations, le burn-out, le mouvement Vegan, les survivalistes ou même les attentats de Charlie Hebdo. C’est très vaste !

Comment définiriez-vous le métier de journaliste aujourd’hui ? Comment a-t-il évolué ces dernières années avec la digitalisation de l’information ?

Le métier s’est très fortement précarisé.

J’ai la chance d’avoir un CDI dans un média solide, racheté en 2014 par les propriétaires du Monde (le trio Bergé-Niel-Pigasse). L’Obs est un hebdomadaire français à fort tirage, vendu essentiellement par abonnements. Mais, comme dans tous les journaux papier, les ventes en kiosque ont baissé depuis que j’ai commencé à y travailler. Pour enrayer cela, le Nouvel Obs a muté en novembre, alors qu’il fêtait ses 50 ans. Nous avons changé de formule et même de nom. Nous nous appelons désormais L’Obs, son diminutif.

Quand j’ai entrepris mes études en journalisme, je craignais que les débouchés soient précaires. Mais l’objectif était de trouver un boulot et j’ai obtenu un CDI. Maintenant, je me demande ce que la presse écrite va devenir… Ce que je trouve triste, c’est ce climat de précarité alors qu’on vit une période révolutionnaire, comparable dans une certaine mesure à l’invention de l’imprimerie. Pour les nouveaux médias numériques, on doit inventer de nouveaux formats. Par exemple, sur les tablettes, on peut imaginer de mettre des infographies, du son, de la vidéo, du dessin-animé…

Tout est à inventer, c’est génial ! Mais dans le même temps, nous vivons tous une crise individuelle et collective dans la profession, c’est assez déprimant. Tout ça dans une période qui devrait être très stimulante.

Le modèle économique n’est pas encore trouvé sur le web alors que ce média est désormais indispensable. A L’Obs, on propose de nouvelles offres payantes : l’application quotidienne L’Obs du soir, l’accès aux magazines en version digitale en avant-première, etc. Mais ce n’est pas évident car les gens ont perdu l’habitude d’acheter. On est vraiment dans une période de transition !

Quelle est votre journée type à L’Obs ? Quelles sont vos sources d’information ?

Pour trouver des idées, il faut être en alerte, lire les journaux, échanger avec son entourage, observer les sujets émergents sur les réseaux sociaux. J’utilise beaucoup le web pour avoir de l’info, Twitter pour contacter les gens en direct. Et Facebook m’est très utile pour trouver des témoins (via des groupes créés sur des sujets de société précis) et pour faire de la veille-presse. Une fois que j’ai une idée, je la propose au rédacteur en chef qui décide si le papier se fera ou non. Il faut savoir convaincre !

Ma journée type : je fais mes interviews, au téléphone ou en face à face, je pars en reportage, je lis, je rédige mes articles. Ce qui scande mon emploi du temps, ce sont les deadlines à respecter pour les bouclages.

Quel usage faites-vous des outils mis à votre disposition par les services et les agences RP (communiqués de presse, conférence de presse, etc.) ?

Je reçois énormément de communiqués de presse qui ne me sont pas forcément destinés… Certains attachés de presse ne ciblent pas et diffusent leurs informations en masse ! Petit conseil aux attachés de presse : se renseigner en amont sur le journaliste contacté et regarder l’ours des journaux pour savoir qui fait quoi dans la rédaction. Ce serait un gain de temps pour tout le monde.

Si tu dis la même chose à un journaliste Culture qu’à un journaliste Beauté, ça n’ira pas. On ne contacte pas un journaliste de Elle comme un journaliste du Figaro !

C’est moi qui décide de tous mes sujets et, si j’ai besoin d’informations complémentaires, je contacte les attachés de presse concernés, par exemple dans des maisons d’édition sur un auteur qui m’intéresse.

Pourriez-vous nous parler de L’Obs du Soir, le nouveau « quotidien digital de l’Obs » ?

L’Obs du Soir, c’est une histoire par jour + des petites news. J’ai eu l’occasion d’en faire trois : sur un escroc du Bon Coin traqué par un hacker, sur Christophe André, le « gourou du bonheur », et sur un photographe chilien dont la famille a été contrainte à l’exil après la mort de Salvador Allende.

C’est une offre numérique journalière payante disponible sur tablette et smartphone. Ce n’est pas du hard news, c’est informatif et distrayant en même temps.

En tant que lectrice, je trouve que c’est une réussite !

Entretien mené par Delphine Pachoud,
Responsable Avant-vente  MAP Institut  / @DelphinePachoud

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