Rencontre avec Claire Berthelemy et Pierre Leibovici, cofondateurs du slow média L’Imprévu

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Le paysage médiatique français a vu, ces derniers mois, de nouveaux sites d’informations apparaître sur la toile. Après  Le Quatre Heures, l’Ijsberg et le Zéphyr Mag c’est  L’Imprévu qui sera prochain à voir le jour.  A l’instar des autres rédactions citées, l’équipe de « l’Imprévu » milite pour un journalisme de qualité en réaction à l’infobésite qui prédomine sur le web et veut « prendre le temps » pour fabriquer du contenu. Nous avons rencontré Claire Berthelemy et Pierre Leibovici qui, d’une seule voix, nous ont parlé de leur projet.

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Qu’est-ce qui vous a poussé à monter ce projet?

Nous sommes 5 anciens journalistes d’un site qui s’appelait Owni.fr. Après la fermeture du site, on a continué à se voir et à partager la même vision critique des médias sur le web. Comme d’autres on regrettait que la majorité des articles que l’on pouvait lire sur le web manquait souvent de profondeur. En plus, le problème sur le web, c’est qu’une information est souvent chassée par une autre et que, finalement, on n’entretient pas la mémoire des lecteurs. Suite à ces constats, on a décidé de créer L’Imprévu afin de tenter de raviver les mémoires.

Dites-en nous un peu plus concernant votre traitement éditorial ?

Dans L’Imprévu, il y a l’idée de ralentir l’actualité et de faire un pas de côté. Cette philosophie, on la décline sur 3 formats différents qui sont nés de notre expérience de lecteurs et de journalistes. Le premier, c’est la notion d’enquête et de reportage qui est commune à beaucoup de médias. On a la volonté de rendre intelligible ce qui ne l’est pas encore. L’idée c’est de défricher. Cette rubrique s’appellera « Affaires à suivre ».

Le second format s’appellera « Droit de Suite ». C’est une rubrique où l’on reviendra sur des évènements où certains angles n’ont été pas été ou peu traités par les médias d’actualités. Ceci n’est pas une critique, juste un constat. Lors de la couverture médiatique d’évènements, il y a beaucoup de sujets et d’angles qui ne sont pas développés mais qui méritent que l’on ralentisse un peu et que l’on revienne dessus a posteriori. C’est ce que l’on veut faire.

Le dernier format, ce sera la section « Fil rouge » qui nous permettra de rendre certains aspects de sujets complexes plus compréhensibles. Prenons l’exemple de l’optimisation fiscale de Google ou d’Amazon. C’est un sujet qui génère beaucoup de dépêches et d’articles mais y a-t-il beaucoup d’articles qui tentent de faire de la pédagogie et qui prennent le temps d’expliquer ce qu’est vraiment l’optimisation fiscale ?

Cette section « Fil Rouge » servira donc d’abord à donner des clés sur des sujets dont on parle trop vite dans les médias. Ensuite, certains « Fils rouges » enrichiront nos « Droits de Suite » et « Affaires à suivre », en leur donnant du contexte. Pour reprendre l’exemple précédent, il sera possible de lire une enquête fouillée sur Google en Irlande (« Affaire à suivre »), tout en comprenant les nombreux enjeux de l’optimisation fiscale (« Fil Rouge »).

Votre site vitrine donne la possibilité aux lecteurs de s’inscrire et d’avoir accès à la version béta privée du site dès qu’elle sera disponible. Vous parlez d’un espace participatif et de co-construction. En quoi cela consiste-t-il ?

L’idée, c’est d’impliquer le lecteur dès le départ en tant qu’acteur et citoyen actif. On ne veut pas qu’il reçoive juste de l’information mais qu’il participe également à la construction du média. On va donc prochainement faire participer ceux qui le veulent a des échanges autour de l’éditorial, du design et du développement du site, d’abord avec une version béta privée qui sera accessible le 29 juin puis, quelques semaines plus tard, avec une version béta publique.

Sur quel modèle économique comptez-vous fonctionner ?

On fonctionnera avec les revenus tirés des abonnements et on aura une deuxième branche de financement qui proviendra de revenus tirés des différentes formations que l’on propose déjà depuis plusieurs mois. En tant que journalistes, on a d’abord la volonté de transmettre de l’information au lecteur et de la lui faire payer car on part du principe que l’information de qualité ne peut pas être gratuite. On a également envie de transmettre ensuite notre expérience et nos savoirs développés notamment lors de notre passage chez Owni.fr concernant les nouvelles écritures, le Data journalisme, les infographies ou bien encore l’utilisation des réseaux sociaux.

Justement, le public est-il prêt à payer aujourd’hui pour le type d’informations que vous voulez produire ?

Il y a un marché qui se développe. Pour les médias qui se sont lancés avant nous (le Quatre heures, Ijsberg, le Zéphyr ), cela semble prendre. Nous ne sommes donc pas les seuls à imaginer que ce type de contenu puisse réussir. Le Quatre Heures a déjà pas mal d’abonnés alors qu’ Ijsberg – même si c’est gratuit – est entrain de développer d’autres choses et de se faire un nom. Le lectorat est là. Il y a le site Les Jours.fr qui va bientôt arriver donc cela conforte notre intuition de départ. D’une manière générale sur le web, le payant prend de plus en plus de place et je pense qu’il y a une prise de conscience par le lecteur qu’il faut payer pour avoir une information différente de celle dupliquée sur tous les sites en accès libre.

Qu’est-ce qui va faire que vous allez vous démarquer des autres médias ?

On a chacun une approche de l’information différente et une identité propre. Mais on est les seuls à vouloir systématiser les retours sur les évènements, à vouloir allier la rétrospective et la pédagogie, tout en y attachant un esprit d’enquête. Dans cet écosystème là, on ne se situe pas en concurrence directe car ce n’est pas l’idée. Nous sommes partisans d’une bonne entente entre tous les nouveaux médias car, a priori, il y a de la place pour tous les acteurs sur ce créneau.

Vous avez un rapport particulier au temps ? Prendre le temps, cela reflète votre philosophie et la manière dont vous envisagez le fonctionnement d’un média ?

Notre rapport au temps est assez simple : un lecteur ne peut pas tout lire, par contre, il peut consacrer du temps à quelques histoires. On ne veut pas abreuver les gens avec beaucoup d’informations. On préfère produire huit-neuf voire dix papiers et se concentrer sur le contenu. Il faut laisser le temps aux lecteurs. Réciproquement, en tant que journalistes, on a besoin de temps pour fabriquer les reportages et si l’on veut qu’ils soient de qualité, il faut prendre le temps de les faire.

Les autres cofondateurs de L’Imprévu sont Thomas Deszpot, Marie Coussin et Camille Gicquel

Propos recueillis par Alexander Paull

Un petit rayon de Com'

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