Bousculer les schémas établis pour construire de nouvelles relations

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Tribune Florence Touzé, professeure à Audencia SciencesCom et co-titulaire de la chaire Impact positif : la pyramide Maslow, Il est temps de bousculer les schémas établis.

#ParoledExpert

Les imaginaires d’appartenance existent plus que jamais, via les marques ou les réseaux sociaux.

Florence Touzé, professeure à Audencia SciencesCom et co-titulaire de la chaire Impact positif.

Les études nous parlent toutes d’un consommateur en cheminement vers de nouveaux modèles et de nouveaux usages. Et les ventes le confirment, les comportements changent. Concerné par son avenir et le bien commun, ce consommateur impliqué veut apporter sa pierre à la recherche d’un mode de vie plus apaisé, plus rassurant. Et il en attend autant du comportement des entreprises et des marques, tant au niveau des offres qu’en terme de communication.

Nous avons pu penser il y a quelques années que la consommation responsable était principalement liée au besoin de réalisation personnelle d’une population favorisée, les fameux bobos. (Cette caricature facile qui a, semble -t-il, disparu depuis des études et des conversations.) Arrivée à l’échelon ultime de la fameuse pyramide de Maslow, cette population aurait donc trouvé dans la consommation responsable le moyen de satisfaire son besoin d’accomplissement.

Nous avons compris depuis que cette consommation a en fait des racines bien plus profondes et qu’elle concerne le plus grand nombre. Consommer responsable est un besoin en passe de devenir fondamental pour les nouveaux consommateurs que nous sommes, pour satisfaire les nouvelles aspirations qui nous animent, pour atténuer les nouvelles peurs qui nous traversent, pour résoudre nos paradoxes entre raison et plaisir.

Cela nous fait redescendre dans la pyramide !

Ou plutôt, cela nous amène à la repenser, car la chronologie proposée par Maslow en 1943 est désormais plus que bousculée. Elle supposait qu’un nouveau besoin se faisait sentir quand le précédent était satisfait. Et qu’ainsi, comme avec l’ascenseur social, nous progressions vers le sommet des désirs et des besoins, passant par marches successives du souci d’avoir à celui d’être. En dessinant une logique solide, la pyramide a donc forgé les stratégies et les arguments de décennies de marketeurs et de communicants. Chaque problème y trouvait une solution. Chaque besoin, une offre. Et chaque insight, une promesse.

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Il est temps de bousculer les schémas établis

Si nous prenons le temps de considérer les cartes que nous avons en main, si nous décidons de questionner nos habitudes, nous pouvons imaginer une toute nouvelle approche du marché.

Désormais, entre crise économique, crise climatique, crise sanitaire, et nouvelles aspirations, le passage d’une étape à une autre, d’un étage de la pyramide à un autre, se trouve totalement remis en cause. Réinterrogeons le modèle avec nos éléments de contexte. Nous nous pensions, pour une grande majorité de la population de pays développés, définitivement à l’abri des besoins primaires. Nous savons aujourd’hui qu’ils ne sont plus assurés comme nous pouvions le croire … Crise énergétique, pollution de l’eau, pandémie, … Les besoins physiologiques et de sécurité sont de nouveau d’une actualité criante pour l’ensemble de la population mondiale.

Serions-nous revenus à la base de la pyramide, avec la nécessité d’oublier les étages supérieurs ? La réalité est en fait plus complexe. Nous pouvons estimer que “avoir“ et “être“ cohabitent désormais. Ils s’entrecroisent ou plutôt ils s’entrechoquent. “Oui, je souhaite boire une eau dans une jolie bouteille design, conçue par un créateur local, mais une eau saine, sans phosphate ni bisphénol, et dont le transport ne produira pas de déchets ou de gaz à effet de serre…“

Les cinq niveaux de besoins sont toujours bien présents, mais plus uniquement deux à deux, ni étape par étape.

En fait, chacun des types de besoins est lié aux autres, remettant en cause la hiérarchie, la verticalité initiale.

Ainsi, en croisant les liens entre ces besoins plutôt qu’en les compilant, on obtient un mode de pensée et de fonctionnement beaucoup plus en phase avec notre consommateur actuel : “En faisant partie du groupe, je fais partie d’un système qui me protège et dans lequel je m’engage. Je vais pouvoir assurer ma sécurité grâce à l’appartenance“. (Consommation locale, consommation collaborative, souscription… ). “Je vais trouver l’estime de moi (et des autres) en assurant mes besoins vitaux de façon responsable”. (Consommation biologique et équitable … )

Cette interrelation ne sépare plus les deux grandes parties, haute et basse, de l’être et de l’avoir, elle les associe. La sociologie nous avait appris que la consommation permettait l’existence sociale, “je consomme donc je suis“ et nous pouvions croire en la logique “j’existe pour la société, parce que j’ai“. Aujourd’hui, et c’est là que la pyramide se transforme, nous pouvons considérer que la consommation est aussi obtenue par l’existence sociale : “j’ai, parce que j’existe dans et pour la société“. Cette deuxième logique ne remplaçant pas pour autant la précédente. Les imaginaires d’appartenance existent plus que jamais, via les marques ou les réseaux sociaux. Cette deuxième logique s’imbrique donc dans la première en redessinant l’ensemble du processus.

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Réconcilier l’organisation avec ses publics, les accompagner dans leurs aspirations et leurs craintes

C’est donc une nouvelle compréhension du consommateur qui se dessine. Le passage d’une logique verticale et linéaire à une approche transversale et interrelationnelle. Cette vision ne simplifie ni les démarches marketing ni les stratégies de communication ! Mais elle doit déjà permettre d’en poser des bases différentes pour renouer avec un consommateur qui n’a plus rien à voir ni avec celui de l’après-guerre ni avec celui d’il y a 10 ans… Des bases plus horizontales, plus collaboratives, nécessaires à la satisfaction durable de chacun.

Réconcilier l’organisation avec ses publics, les accompagner dans leurs aspirations et leurs craintes, voilà le bel enjeu qui s’ouvre à nous aujourd’hui. Il est temps pour la communication et le marketing de s’engager plus avant dans une transition urgente à mettre en place, de (re)considérer les publics pour mieux les impliquer dans une démarche commune et constructive.

Florence Touzé a publié l’ouvrage « Marketing, les illusions perdues : passez au marketing implicatif !», aux éditions La Mer salée.

https://www.lamersalee.com/livre/marketing-les-illusions-perdues/


Marc Michiels

Marc Michiels

Rédacteur en chef Culture RP, Content Marketing et Social Média Manager : « Donner la parole à l’autre sous la forme d’une tribune, une interview, est en quelque sorte se donner à lire ; comme une part de vérité commune, pour qu'apparaisse le sens sous le signe… ». / Retrouvez-moi sur LinkedIn

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