#JaimeLaCom
Que vous projetiez d’implémenter un nouvel outil, amorcer un changement structurel ou mettre en place une nouvelle stratégie, vous devez prendre en compte le fait que vos collaborateurs – qu’ils soient touchés directement ou indirectement par la décision – traverseront cette courbe du deuil.
Ludovic Salenne, CEO SLN Web, Digital Marketer, Blogger.
C’est une marque d’humour lourd illustrant fortement les carences managériales de nombreux dirigeants que je peux rencontrer sur le terrain quand je leur pose la question du niveau d’adoption d’un changement par leurs équipes.
À ma question « Et le nouveau CRM alors, vos équipes l’utilisent ? » – vous pouvez remplacer CRM par n’importe quel outil ou autre stratégie. J’entends souvent la même réponse. « Ah oui, ils n’ont pas le choix. Je distribue les coups de fouet ! ».
Je vous avais prévenu. C’est de l’humour bien lourd. Et je dois réaliser un effort toujours plus grand pour accorder un sourire de politesse à mon interlocuteur. Car derrière cette légèreté apparente, il y a une personne qui est profondément convaincue qu’instaurer un climat de peur suffit pour convaincre son équipe d’adopter un nouvel outil ou une nouvelle stratégie.
Ces personnes ignorent une chose. Une nouveauté engendre un changement, plus ou moins profond. Ce changement entraine lui un deuil, plus ou moins difficile.
Qui dit changement dit deuil. Qui dit deuil dit accompagnement.
Cette courbe s’applique à tout changement. Les changements structurels évidemment mais également les changements mineurs. Je vais vous donner deux exemples pour l’illustrer. Il y a quelques mois, WordPress – outil que j’utilise pour administrer mon site internet – a fait une mise à jour censée faciliter la vie des utilisateurs. Aujourd’hui, je la valide. En revanche, le matin où je l’ai découverte, j’ai failli balancer mon MacBook par la fenêtre. Littéralement. Je suis passé par cette courbe du deuil.
J’étais d’abord dans le déni. Cette mise à jour, je n’en veux pas et je vais trouver une manière de revenir en arrière.
Je suis ensuite entré dans la phase de remise en question. Je ne peux pas revenir en arrière, est-ce que je vais réussir à publier mon article comme prévu ?
Enchainant les difficultés, je suis arrivé au point critique : j’abandonne ou je continue ? Naturellement, ne s’agissant pas d’une question de vie ou de mort, j’ai persévéré.
Je suis entré en phase de remobilisation. Comprenant petit à petit comment faire différemment ce que je faisais quotidiennement depuis quelques années.
Après la mise en ligne de 2 ou 3 articles, je suis entré en phase de d’engagement. Et j’ai intégré le « nouveau WordPress » dans mon quotidien. Dans un cas comme celui-ci, il est évident que cette courbe du deuil passe relativement vite. En quelques jours, quelques heures voire bien souvent quelques minutes.
Mais intéressons-nous à un changement plus important que nous avons tous vécu au Printemps 2020. Vous voyez de quoi je veux parler ?
Évidemment, je parle du confinement et de la Covid-19. Être confiné, porter le masque ou encore basculer immédiatement en mode télétravail ont été des changements énormes pour beaucoup d’entre nous.
Voici à quoi a pu ressembler la courbe du deuil par laquelle nous sommes passés :
Pendant longtemps, nous avons été en phase de déni : « le masque, le confinement strict, les risques liés à la maladie… ce n’est pas pour moi ! »
Puis nous sommes restés un bon moment en phase de remise en question : « est-ce que je vais être malade ? Suis-je en danger ? Vais-je tenir pendant tout le confinement ? Vais-je réussir à travailler à la maison ? »
Au moment de l’annonce de la reconduction du confinement par Emmanuel Macron, nous étions sans doute nombreux à nous retrouver au point critique.
Puis nous sommes progressivement entrés en phase de remobilisation. Nous avons accepté les contraintes, qu’elles allaient durer dans le temps et les avons intégrés à notre quotidien.
Maintenant, nous sommes dans la phase d’engagement. Et ça n’a pas été sans peine. Tout aurait été plus simple si le gouvernement avait pu mettre en place un plan de conduite du changement. À l’échelle d’un pays, c’est sans doute mission impossible.
Mais à l’échelle de votre entreprise ?
Les 4 étapes de la conduite du changement
Que vous projetiez d’implémenter un nouvel outil, amorcer un changement structurel ou mettre en place une nouvelle stratégie, vous devez prendre en compte le fait que vos collaborateurs – qu’ils soient touchés directement ou indirectement par la décision – traverseront cette courbe du deuil.
Votre rôle est alors de mettre en place un plan de conduite du changement passant par ces 4 étapes :
Étape 1 : la découverte des intérêts
Quand un changement arrive, on a tendance à le rejeter car l’inconnu fait peur. Et que, comme le dit bien l’adage, on sait ce qu’on perd mais on ne sait pas ce qu’on gagne.
Vos collaborateurs entrent donc en posture de déni. Et vous devez donc les persuader de vous suivre en menant des actions de sensibilisation :
- Définir précisément la vision et la communiquer avec les bons messages ;
- Transmettre les avantages de cette décision pour les personnes concernées.
Ces deux points sont naturellement plus évidents quand vous prenez la peine d’organiser des ateliers de co-construction.
Vos collaborateurs vous suivront bien plus volontiers s’ils ont participé à la prise de décision. Ou qu’ils en ont le sentiment en tout cas.
Étape 2 : la découverte des actions à mener
Maintenant que vos collaborateurs ont accepté bon gré mal gré le changement, ils découvrent comment leur quotidien va être impacté. Et les actions qu’ils vont devoir mener.
Naturellement, cette découverte amène son lot de doutes : « vais-je y arriver ? Ai-je les compétences nécessaires ? »…
Pour passer avec succès cette étape, vous devez prévoir un plan de formation et/ou de coaching adapté à chacune des parties prenantes.
Étape 3 : l’intégration du changement dans son quotidien
Vos collaborateurs sont entrés dans l’action : ils expérimentent. Parfois avec succès, souvent en enchainant les difficultés. C’est naturel.
Il y a deux erreurs à ne pas commettre à ce stade :
- Transmettre vos doutes quant à l’atteinte des objectifs finaux ;
- Ne faire que souligner les échecs.
Vos collaborateurs ont accepté de sortir de leur zone de confort. Et ils font de leur mieux pour mener à bien le changement que vous avez décidé.
S’ils ont l’impression de ne pas en faire assez ou de ne pas faire assez bien, ils vous lâcheront.
Trop de managers et dirigeants font l’erreur de ne se focaliser que sur l’objectif final alors qu’il y a de nombreuses étapes intermédiaires qui sont en train d’être validées avec succès.
Vous devez prendre soin de féliciter vos équipes pour les motiver à poursuivre l’adoption du changement. Et tout ira pour le mieux.
Attention quand même !
Beaucoup d’entreprises pensent que le projet a été mené à bien à ce stade. Ce n’est pas le cas, vos équipes peuvent faire machine arrière donc restez attentif pour la prochaine étape.
Étape 4 : le temps de la maîtrise
Nous y sommes. Vos équipes ont intégré le changement dans leur quotidien. Et ils ont atteint un niveau de maîtrise satisfaisant des nouvelles compétences requises.
Deux erreurs à ne pas commettre ici au risque de subir une vague de démissions :
- Ne pas célébrer/récompenser le changement ;
- Enchaîner directement avec un autre changement.
C’est tentant, je sais. Les objectifs sont atteints et on veut passer immédiatement au projet suivant.
Prenez le temps de souffler, vraiment.
Comme vous avez pu le voir au fil de cette tribune, un changement demande des efforts et une énergie folle de la part de vos collaborateurs. Enchainer sur un autre projet, c’est prendre le risque de les épuiser.
Vous ne voudriez pas être responsable d’un Burn-Out ?