Matière à réflexion : Bernard Petitjean et Corinne da Costa – Seprem Etudes & Conseil
Lorsque Bill Gates affirmait que « Content is king », il pensait vraisemblablement plus Internet que papier. A tort, comme le démontre le Palmarès des meilleurs magazines de l’année qui illustre la force et la singularité d’un média en perpétuel renouvellement et désormais présent sur tous les supports.
Le prix du magazine de l’année qui va à « M le Magazine du Monde » est porteur de deux leçons. La première est qu’il faut savoir agir vite lorsque l’on a une vision et une conviction : il ne s’est écoulé que 3 mois entre la décision de lancer un magazine du week-end et son arrivée dans les kiosques. La seconde est qu’il ne faut pas avoir peur de l’écrit à l’heure des images et des tweets : les papiers de « M le Magazine du Monde » flirtent souvent avec les 25.000 signes !
Le fait que le prix de l’innovation couronne le mensuel « Néon » est une autre « matière à réflexion ». Etait-ce bien raisonnable pour un groupe spécialiste de la grande diffusion (Prisma Média) de lancer un magazine aux contenus très denses à destination des 25-30 ans ? La réponse semble bien être positive. Cette génération qui, contrairement à ce que l’on pense, lit beaucoup, mais gratuitement et sur écran, peut être séduite par un support payant s’il utilise tous les atouts du papier, et notamment la force de l’écriture et du visuel.
« Biba » obtient le prix « 10 années de succès » pour avoir fait progresser sa diffusion de 90% en une décennie. Comme leurs lectrices, les magazines féminins n’aiment pas trop afficher leur âge. La vérité est que « Biba » a 33 ans et plusieurs liftings réussis à son actif qui démontrent que les magazines figurent parmi les rares produits susceptibles (comme les chats) d’avoir plusieurs vies.
Que le prix de la meilleure marque magazine aille à « Elle » n’est pas une surprise. L’esprit et les valeurs de l’hebdo vivent au travers de dizaines d’éditions internationales, du quotidien Web de la mode « Daily Elle », de sites et d’applications, de prix littéraires et autres, de présences massives sur les réseaux sociaux, d’une fondation d’entreprise qui œuvre pour l’éducation et la promotion des femmes, etc. Question : une marque uniquement numérique pourrait-elle se déployer aussi largement sans perte de valeur, d’utilité et d’attachement ?
Autre question qui donne à penser sur l’influence des médias imprimés : Arnaud Montebourg serait-il aussi irrémédiablement associé et à Armor-Lux et au « made in France » si la photo de Une du premier numéro du « Parisien Magazine » (Prix du coup éditorial 2013) avait été remplacée par une intervention télévisée ou une vidéo en marinière sur les réseaux sociaux ?
En décernant son prix du magazine passions à « So Foot » et son coup de cœur à « Causette », le Jury du Palmarès des Magazines de l’Année a également fait œuvre utile en nous rappelant que, non seulement les aventures de presse rentables demeurent possibles, mais que des façons aussi originales de traiter du sport et de la vie au féminin n’auraient sans doute pas pu s’exprimer au travers d’autres médias que la presse.
Bernard Petitjean ([email protected])
et Corinne da Costa ([email protected])
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