#Paroled’Agence
Pour atteindre une communication cohérente, il est nécessaire d’anticiper les événements futurs. Cela peut paraître impossible tant la crise est synonyme d’imprévisibilité. Pourtant, les entreprises qui se sont préparées en amont, s’en sortent généralement mieux, tout comme celles qui ont envisagé le pire.
Florent Chapel, Directeur général adjoint de LJ Com.
A la fin de chaque crise, il est d’usage d’organiser un retour d’expérience. Si cette phase est parfois oubliée, elle a pour vertu de clôturer formellement l’événement mais aussi de faire le bilan de sa gestion. Certes, la crise sanitaire n’est pas encore terminée avec la troisième vague qui se profile. Pourtant, un an après, il est déjà possible de tirer des premiers enseignements en matière de communication de crise pour les entreprises.
Enseignement n°1 : transparent, tu seras
Jamais la transparence n’a été tant nécessaire. Cela peut sembler évident tellement ce mantra a été invoqué, répété, rabâché, etc. Pourtant, son application par les organisations lui fait toujours défaut. Cela peut se comprendre car le terme peut être trompeur car il ne s’agit pas de tout dévoiler. Bien au contraire, la transparence est l’explication des tenants et aboutissants, des raisons, des implications de l’évènement en question. Elle vise à apporter des réponses aux questions légitimes (ou non) qui se posent à la suite d’un problème. Avec la baisse de la confiance, ce challenge sera d’autant plus grand. L’exemple des vaccins en est surement le meilleur exemple à cet égard.
Enseignement n°2 : cohérent, tu veilleras à être
Rarement évoqué en tant que tel, être cohérent est le corollaire d’une communication transparente. Il est surtout un impératif pour donner un sens à ce qu’il se passe. Mais aussi montrer que la situation est gérée. De ce point de vue, la cohérence a une triple dimension :
- Instantanée : les mesures et le discours doivent former un ensemble compréhensible et logique ;
- Multicanale : avec la multiplication des canaux de communication, l’entreprise doit s’assurer que le même message soit délivré ;
- Temporelle : elle doit s’inscrire dans le temps. Le web regorge d’exemple d’entreprises ayant tenu un discours puis son contraire. En période de crise, cet impératif est d’autant plus important qu’une contradiction donnera l’impression d’un mensonge / d’une dissimulation.
La crise a-t-elle vraiment changé les métiers de la communication ?
Écouter le débat du Press Club
Enseignement n°3 : anticiper, tu devras
Pour atteindre une communication cohérente, il est nécessaire d’anticiper les événements futurs. Cela peut paraître impossible tant la crise est synonyme d’imprévisibilité. Pourtant, les entreprises qui se sont préparées en amont, s’en sortent généralement mieux, tout comme celles qui ont envisagé le pire.
Enseignement n°4 : l’interne, tu n’oublieras pas
La Covid-19 a plongé l’ensemble de nos sociétés dans une crise systémique sans précédente et par ricochet les entreprises également. Contrairement aux crises précédentes, les entreprises se sont retrouvées être un point parmi tant d’autres. Cela les a conduites à se recentrer sur leur public prioritaire. Ainsi, l’interne souvent délaissé s’est avéré être le premier public des entreprises. Dans cette perspective, les entreprises délaissant l’interne ont été la cible de critique voire de poursuite à l’image d’Amazon qui fut condamné pour ne pas avoir pris les mesures nécessaires pour protéger ses employés du Covid-19
Enseignement n°5 : engagé, tu seras
Les entreprises, qui ont bien communiqué, sont celles qui ont su s’engager pour la société en laissant de côté, momentanément, leur recherche du profit. Démontrer son utilité sociale concrètement au-delà des discours a été l’unique moyen pour les entreprises d’émerger, à l’image du groupe SPHERE.
Le leader européen de l’emballage avait mobilisé plusieurs de ses usines pour produire en urgence des surblouses pour les hôpitaux qui en manquaient cruellement. Cet engagement authentique a permis de mobiliser les salariés en leur donnant un sens à leur activité à un moment où les repères n’existaient plus.
La crise a-t-elle vraiment changé les métiers de la communication ?
Écouter le débat du Press Club
Enseignement n°6 : le bon canal, tu choisiras
A une époque où les canaux de communication sont démultipliés avec l’accélération du digital, lequel choisir pour faire passer son message au plus grand nombre ? On aurait pu s’attendre à la réponse suivante : les réseaux sociaux tant ceux-ci sont dans l’ère du temps. Pourtant, les médias traditionnels sont restés la source d’informations : en moyenne les Français ont regardé une heure de plus la télé pendant le confinement et les JT ont battu des records d’audience. Ainsi, si l’objectif est de s’adresser au plus grand nombre, la grande messe du soir est le canal à privilégier plutôt que se disperser sur les réseaux sociaux où la segmentation augmente le risque d’incohérence.
Enseignement n°7 : le faux, tu surveilleras
Si les infox ne sont pas spécifiques à cette pandémie, elles ont atteint un sommet jusqu’alors inégalé au point que l’OMS parle d’« infodémie ». Comme l’explique le sociologue Gérald Bronner, ce qui caractérise notre époque est que l’ensemble des points de vue sont mis en concurrence que cela soit celui de la science ou de celui de la pseudo-science par exemple.
Pour les entreprises, l’enjeu n’est plus tant d’identifier les risques, de les anticiper pour s’y préparer, mais également d’imaginer à devoir faire face aux fausses informations. Dans cette perspective, il est nécessaire d’aller au-delà du simple bruit surveillé par les entreprises pour analyser les tendances sous-jacentes qui traversent nos sociétés.
Enfin, depuis plus de 20 ans, la défiance s’est installée comme étant la règle tant vis-à-vis des « élites », des institutions que des organisations. C’est pour cette raison que les entreprises sont confrontées à un défi de réorganisation : maintenir une relation de confiance durable avec leurs publics. Pour être en mesure d’y répondre, les directions doivent être souples, rapides et mobiles. Ce constat s’applique également aux organisations publiques où « la multiplication, la juxtaposition, éventuellement la superposition de structures administratives pléthoriques » (ex. CCS, CIC, Cofrac, Coreb, Corruss, CPP, Craps, CZA, SZDS, PVUS, SAPR) nuit à la mise en place d’une réponse efficace comme le souligne un récent article du Point sur le rapport de la Commission d’enquête du Sénat à propos de la gestion de l’épidémie.