Culture RP a rencontré Laurent Sabbah, Directeur de la communication interne du Club Méditerranée.
Laurent Sabbah est un professionnel de la communication. Il a été tour à tour, journaliste, consultant, coach, enseignant et communicant en entreprise. Expert dans les domaines de l’information et de la communication, et curieux invétéré. Il enrichit ses pratiques en puisant dans la diversité des savoirs il établit des liens entre la richesse des savoirs : sociologie, philosophie, ethnologie, psychologie, sémiologie…
Laurent Sabbah, Directeur de la communication interne du Club Méditerranée, présentez-nous votre parcours ?
J’ai évolué du monde de l’information à celui de la communication. Après être passé par Sciences Po et le CELSA, j’ai été journaliste dans l’audiovisuel durant une dizaine d’années. Ce fut un moment passionnant et très riche de rencontres. L’envie d’adjoindre une dimension « stratégique » à mon métier m’a conduit naturellement vers le Conseil en communication. J’ai travaillé plusieurs années pour l’agence de communication nord-américaine, Edelman. J’ai beaucoup appris et découvert l’univers des entreprises et de la communication corporate. Une troisième étape dans ce parcours m’a conduit à intégrer le Club Méditerranée au poste de Directeur de la Communication Interne. J’ai appris un nouveau métier où les enjeux de « relation » dominent sur les problématiques « d’image ». J’ai, notamment, accompagné la stratégie de montée en gamme et de repositionnement de la marque Club Med. Un immense chantier qui nécessite d’accompagner les managers et leurs équipes dans des transformations majeures.
Vous avez lancé une plateforme web destinée aux collaborateurs du Club Med intitulée « enjoy!« . Pouvez-vous nous expliquer la genèse de ce projet et quels en sont les contours ?
Le « bon de commande » de mes patrons était simple : mettre la « communication interne » sur une orbite digitale. Notre objectif était de lancer le « Village Virtuel du Club Med » pour les collaborateurs que l’on appelle G.O (Gentils Organisateurs). Ce « village » devait être facilement accessible quel que soit l’endroit du monde d’où l’on se connectait. Le site se décline en français et en anglais. Il est accessible sur smartphones, tablettes et ordinateurs en responsive design. Le cœur du projet était de créer un site permettant de porter, d’illustrer et de promouvoir une culture unique baptisée « Esprit Club Med ». Nous sommes partis du constat que cette culture était, pour nos équipes comme pour nos clients, un « avantage compétitif » qui faisait la différence avec tous nos concurrents. Elle était précieuse. Il était important de la connaître, de la préserver, de la vivre et de la transmettre. La seule façon pour le faire était de l’incarner à travers des hommes et des femmes, à travers leurs initiatives, leurs passions, leurs audaces ou leurs rencontres. C’est sur ces bases que nous avons défini notre ligne éditoriale où l’image, qu’elle soit vidéo, photo, graphique, prime. La richesse et le renouvellement quotidien des contenus étaient impératifs pour faire vivre le site et le développer. La production de contenus attractifs était, également, un enjeu essentiel. Si au démarrage l’équipe de la Communication interne a été moteur pour enclencher « la pompe » et nourrir le site, progressivement, les infos, les vidéos ou les photos ont été produites par nos villages, nos bureaux ou nos agences commerciales. Aujourd’hui, ils alimentent régulièrement enjoy! en apportant une grande diversité culturelle, géographique, de métiers et de parcours. Cette plateforme interne permet de partager des infos « made in Club Med » et des contenus présentant des initiatives et des tendances du tourisme et de l’entertainment « venus d’ailleurs ». L’objectif est de ne pas se regarder, seulement, le « nombril » mais d’être ouvert à la diversité du monde. C’est aussi cela l’Esprit Club Med. Nous avons adjoint à chacun des posts une petite application « WiFeel ». Elle permet de réagir émotionnellement à une information à travers une palette de 10 émotions. L’émotion, c’est aussi l’un des aspects de l’Esprit Club Med. Nous nous devions d’aller au-delà d’un simple « Like ».
Enjoy ! a été l’occasion de travailler en mode collaboratif sur un projet digital. Votre organisation actuelle n’ayant pas de pôle digital dédié, comment avez-vous réussi à faire converger l’ensemble des collaborateurs sur la nécessité d’un tel projet ? Vous êtes-vous fait accompagner par une agence ?
Dans la phase de réflexion, et très en amont, l’agence SMART nous a aidés. Nous avons pu nous forger des convictions et clarifier le sens de notre projet. Ensuite, c’est l’agence New–BBDO qui nous a accompagnés pour la mise en place effective du site.
Au-delà de ces partenaires, nous avons mis l’accent sur le mode collaboratif durant toute la période d’élaboration du projet en sollicitant des GO venus de tous les horizons (bureaux et villages). Il était important de valider nos réflexions et de les enrichir. Cette phase a permis d’être en résonance avec les attentes de nos « clients internes ». Aujourd’hui, nous rassemblons près de 4 000 profils soit 50% du potentiel de GO capables de se connecter. C’est une première étape. L’outil a du potentiel si nous continuons régulièrement à challenger la pertinence des contenus.
Quel est votre avis sur les réseaux sociaux en entreprise ?
Une tendance de fond se développe, on pourrait l’appeler « l’économie de l’horizontalité ». Aujourd’hui, des entreprises telles que BlaBlaCar, Airbnb ou Uber en sont les plus belles illustrations. Les logiques de « verticalité » sont bousculées même si je crois qu’elles sont loin de disparaître. Dans l’entreprise ces phénomènes économiques commencent à avoir une réalité sociale. Ils nous obligent à repenser les modèles de communication. C’est là que les Réseaux sociaux d’entreprise entrent en jeu. Cette « horizontalité » a pu nous laisser croire, nous communicants d’entreprise, que nous pouvions développer des Facebook internes ou des Twitter Corporate. Il me semble que c’est un leurre. A l’intérieur de l’entreprise la « verticalité » du pouvoir a encore sa place malgré les « modes projet », « les dynamiques de co-construction » et autres « organisations matricielles ». Comment alors développer des réseaux sociaux fonctionnant sur des logiques libertaires ? Comment sortir d’une parole corporate maîtrisée dans un univers, celui des réseaux sociaux, qui s’expriment à travers une parole totalement libre voire anarchique ? C’est toute la limite. En revanche, les réseaux de travail collaboratif sont utiles et performants. Mais pour les Facebook internes, il faudra encore patienter. Le modèle n’a pas encore émergé.
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Carole Mazurier, Responsable Communication Externe de l’Argus de la presse / Linkedin / @Argusdelapresse / @CultureRP