Culture RP a rencontré Catherine Bonneville-Morawski, Fondatrice et Dirigeante du Club ComElles.
Votre parcours, le constat, les raisons et l’ADN de la création du Club ComElles ?
J’ai travaillé pendant plus de 25 ans dans les métiers de la communication, dans l’informatique, les télécoms, internet puis la banque.
Alors que j’étais Directrice de la Communication et que l’arrivée du digital commençait à impacter nos métiers et à modifier les organisations j’ai créé le Club Comelles avec des professionnelles, pairs et partenaires agences et médias.
L’objectif était de créer une dynamique annonceurs/agences/médias pour anticiper les changements de nos métiers et partager les bonnes pratiques, dans le cadre d’un Club solide et solidaire au sein duquel toutes les membres se rencontrent très régulièrement et se connaissent bien.
Le Club rassemble donc des Directrices Communication, Marketing et Digitale en entreprise et des Directrice commerciale, DGA, DG d’agences et de régies médias qui se retrouvent chaque mois soit pour un atelier métier, soit pour un dîner d’échanges avec un ou une invité(e).
Ces dîners sont l’occasion de réfléchir, en prenant du recul, sur un thème annuel qui impacte nos métiers. L’an dernier nous avons travaillé sur la créativité, cette année sur la notion de responsabilité.
Sur ce thème, nous avons – par exemple- échangé avec une journaliste (Ruth Elkrief), une experte RSE (Geneviève Ferone), le DirCom de la Société Générale au moment de l’affaire Kerviel (Hugues Le Bret), un politique « présidentiable » (Bruno le Maire), la présidente d’une ONG…
Au-delà de sa vocation première, le Club est donc aujourd’hui une communauté d’échanges et d’inspiration qui, par la parole des femmes du métier, porte un regard différent sur le marché et propose des actions et des événements spécifiques.
Nous avons, par exemple, organisé une conférence sur le Big Data ou sur l’employabilité, ouvert – bien entendu – à tous les professionnels, femmes et hommes.
Par ailleurs, bien que nos métiers soient largement féminisés, nous constatons que, à l’instar de ce qui se passe dans la plupart des entreprises, les femmes sont souvent bloquées dans leur progression, dans leur rémunération ou dans l’accès aux postes à responsabilité. Le plafond de verre existe bel et bien également dans notre secteur.
Nous travaillons donc également sur ce sujet, afin de faire bouger les lignes. Nous avons co-organisé l’an dernier un hackathon sur l’égalité professionnelle qui a réuni plus de 250 participants pendant 2 jours.
Nous venons de lancer un programme de mentoring ouvert à toutes les professionnelles du secteur qui propose un accompagnement d’une année. Nous avons réuni autour de cette initiatives les parties prenantes du marché dont l’AACC, l’UDA, l’UDECAM, le SNPTV, l’IAB, RTL et Audiens.
Le Club ComElles réunit des femmes issues de tous les métiers de la Communication et du Marketing. Il est le seul à accueillir annonceurs, médias et conseils en communication. Comment devient-on membre du Club et pour quelles synergies ?
Réunir des professionnels d’organisations complémentaires qui travaillent ensemble au quotidien, sans pour autant prendre le temps de bien se connaitre, de comprendre leurs contraintes respectives, leur modèle économique est en soit une grande richesse.
Cela fait non seulement gagner du temps, de l’efficacité mais permet d’éviter aussi les idées reçues ainsi que les reproches faciles et infondés qui généralisent certains comportements et qui reviennent trop régulièrement sur les prétendus manquements des uns et les autres.
En outre la diversité des points de vue, la recherche de synergies dans le cadre – réel – des contraintes de chacun, enrichit également les échanges et permet de proposer des approches innovantes.
C’est pour ces raisons que nous avons voulu un Club commun à tous les métiers de la Communication et du Marketing. Nous y abordons les questions « qui fâchent » en toute confiance et en grande transparence, nous sommes vigilantes sur nos pratiques et les membres qui travaillent ensemble affirment que cela rend leur collaboration plus facile et efficace.
Le Club est accessible à toutes les professionnelles qui occupent un poste à responsabilité dans leur structure. Le nombre de membres est volontairement limité à 60 professionnelles afin de garder l’esprit qui est celui que nous avons voulu dès sa création avec des membres qui se connaissent bien, qui se font confiance et qui prennent plaisir à échanger en toute transparence.
En parallèle, parce que nous avons été très sollicitées par des professionnelles qui s’intéressaient au Club et à son actualité sans pouvoir le rejoindre, nous avons créé un groupe fermé sur LinkedIn qui rassemble plus de 1700 femmes des métiers de la Communication et du Marketing. Les membres de ce groupe travaillent pour la plupart en France mais certaines sont au Canada, en Belgique, en Afrique francophone…
Les échanges se font via le groupe. Nous proposons également à ces membres des ateliers, essentiellement sur les carrières, et 2 rendez-vous « physiques » par an.
Quels sont les freins selon vous à une présence mesurée des femmes notamment dans les espace de Direction des entreprises, par quelles actions peut-on inverser la situation ?
Comme partout ailleurs les freins sont essentiellement culturels. On aime se retrouver avec des personnes qui nous ressemblent, c’est humain. Regardez qui sont vos amis, la plupart ont certainement une façon de vivre proche de la vôtre, uns formation semblable…
C’est exactement la même chose dans le monde de l’entreprise : dans un monde créé par des hommes pour des hommes, la première idée est de prendre à ses côtés des hommes.
Les idées reçues elles aussi sont culturelles : les hommes ont envie de pouvoir, ils sont tournés vers l’action et le leadership alors que les femmes ont envie d’harmonie, elles ont un grand sens de l’organisation et font preuve de grandes capacité de travail, etc. En somme, les hommes sont plus aptes à diriger et les femmes sont de bons numéros 2 !
Et ces idées reçues impactent non seulement les décisions, souvent de façon inconsciente, mais également le comportement de ceux et celles qui les portent. Ainsi, un homme pensera plus facilement à donner un poste clé à un homme et une femme aura souvent des difficultés à aller demander le poste et à « se vendre ». Vous connaissez l’histoire des hommes qui demandent un poste quand ils ont 40 % des compétences requises alors qu’une femme hésite à le demander alors qu’elle a 90 % de ces compétences ?
Il faut donc faire prendre conscience aux hommes et aux femmes de ces biais inconscients. C’est ainsi que les hommes challengeront leur première décision et se poseront la question d’envisager tous les talents, hommes et femmes, avant par exemple, de prendre une décision sur une promotion.
Un second point est d’accompagner les femmes à oser faire des choses qu’elles n’ont pas l’habitude de faire : se rendre visible, demander une augmentation ou une promotion…
Enfin, il est indispensable de renforcer le dialogue : avant d’imaginer qu’une collaboratrice refusera une expatriation parce qu’elle est mariée et mère de 2 enfants, pourquoi ne pas lui poser la question ? Et pourquoi un homme ne pourrait-il pas refuser la même proposition pour les mêmes raisons ?
Quant à la présence « mesurée », je ne sais pas ce que cela signifie. S’il s’agit de quotas, le sujet est très controversé et pourtant, la loi Copé-Zimmermann a permis de mettre le sujet sur le devant de la scène.
Mais le sujet n’est pas un sujet de quota, c’est un sujet de talents, recruter et fidéliser les meilleurs talents, d’équilibre et de richesse au service de la performance de l’entreprise.
Quelle est votre positionnement sur les médias sociaux et notamment votre fonctionnement éditorial du groupe ComElles sur Linkedin ?
Les médias sont sociaux sont nos principaux leviers de communication. Le Club est présent sur Twitter (@CComElles) et sur LinkedIn (page entreprise et Groupe Comelles).
Nous communiquons également via la rubriques actualités de notre site (www.clubcomelles.com) et via notre newsletter (inscription sur notre site).
Nous avons aussi créé le site www.sefairementorer.com pour présenter le programme de mentoring que nous lançons.
Sur Twitter, outre les nouvelles du Club, nous communiquons sur les actualités de notre secteur mais aussi sur l’innovation, la digitalisation et sur les transformations RH, 3 sujets d’importance dans nos métiers. Bien entendu, nous prenons également la parole sur les carrières au féminin.
Le groupe LinkedIn est animé par un comité de professionnelles qui, par binôme, propose un calendrier éditorial mensuel sur des sujets liés aux thèmes dont je viens de parler : les grandes tendances de la publicité, l’engagement des collaborateurs, les nouveaux leviers de communication… Elles font un travail remarquable en apportant du contenu de qualité qui engage la communauté.
La question de la carrière au féminin, une question d’égalité, de réseau, la clé de voûte de toute réussite professionnelle ?
Bien-sûr, la question de la carrière au féminin est un sujet important. Et au-delà des points dont nous avons déjà parlé, ces carrières ont également une particularité : elles doivent souvent prendre en compte les congés maternité et la vie de famille avec des enfants. Certaines entreprises ont intégré l’importance de ne pas imposer une gestion linéaire de ces carrières.
C’est pourquoi, à l’occasion du lancement du programme de mentoring nous organisons le vendredi 7 octobre (de 9h00 à 10h30, Paris 9ème) une conférence sur le thème « les leviers pour booster sa carrière au féminin ». Cette conférence est ouverte à toutes et à tous. Il suffit de s’inscrire via le site clubcomelles.com (rubrique Actualités) ou via le site sefairementorer.com.
Nous aborderons le sujet en partageant les constats et les leviers des carrières au féminin.
Des cadres dirigeants, figures clés du secteur de la Communication témoigneront en tant que dirigeants et en tant que managers, en référence à leur propre parcours.
Ils partageront ensuite les meilleures pratiques de leur entreprise en faveur de l’égalité professionnelle femmes-hommes. Nous présenterons enfin le programme de mentoring, une approche qui a déjà fait ses preuves d’efficacité sur le sujet.
Quant au réseau, nous savons tous qu’il est effectivement la clé de voûte de la réussite professionnelle. Nous proposons donc un café-networking pendant 3/4 d’heures, avant le début de la conférence.
Quels sont vos programmes présentés au sein du club d’une façon générale et du lancement de votre programme de mentoring pour les professionnelles de la Communication qui se tiendra le 7 octobre chez Criteo ?
Nous proposons à nos membres des rendez-vous mensuels. Les sujets sont choisis en fonction des demandes et des enjeux de nos membres ainsi que des évolutions du secteur. Nous avons, par exemple, déjà proposé un grand nombre de rendez-vous sur le digital, la créativité mais également sur la prise de parole en public, etc.
Nous avons coutume de dire que le Club est là pour défricher les sujets, créer – si nécessaire – de l’appétence, donner des premières réponses et mettre les membres en relation avec des experts avec qui elles pourront aller plus loin si elles le souhaitent.
La place des femmes dans la communication est une évidence, quoi que ! Le rôle de la mixité au sein des entreprises est un problème, une solution, un levier business complémentaire ?
Evidemment, la mixité et plus largement la diversité sont des leviers de performance pour l’entreprise. Toutes les études réalisées sur le sujet le prouvent.