Culture RP a rencontré les Co-fondateurs Eudes Bonneau-Cattier et Ariane Picoche de la marque de design française YogiToy qui conçoit des jouets en tissu, flexibles et arty, pour les familles en quête de créativité.
Eudes et Ariane quels sont vos parcours respectifs, la raison de la création de la marque Yogitoy et de son ADN ?
Eudes : Je suis architecte et designer, et je dessine aussi bien pour des start-ups technologiques que pour des agences d’architecture. Co-fondateur et président de la marque, je supervise le process de fabrication des YogiToys, prototypés dans les fablabs de Paris.
Ariane et moi avons commencé à travailler ensemble sur un projet de street art, Arbres à louer. Ariane a développé une approche participative inspirée par le collectif « le Mouvement » qui nous a conduits à faire des collages d’Arbres à louer, des moments de dialogue créatif avec les passants. Le projet est devenu un outil de communication pour le « mieux logement ». On a ensuite décidé de développer avec la même énergie les jouets que je commençais à prototyper.
Ariane : J’ai travaillé dans la production audiovisuelle et j’ai réalisé des vidéos avant de m’orienter vers le journalisme culturel. Je suis passionnée par les nouvelles techniques de communication. J’ai notamment créé une plateforme digitale dédiée à l’amour 2.0 : asv-stp.fr, avant de me consacrer à la campagne de crowdfunding de YogiToy fin 2016. Je me suis alors associée à Eudes, et je puise dans mes expériences journalistiques et cinématographiques au quotidien, afin de développer une marque haut de gamme à l’univers créatif, pop et positif.
Les YogiToys sont imprimés avec des encres à base d’eau puis fabriqués à la main dans le respect de la réglementation CE. Ils sont 100% recyclables, lavables en machine (à 30°) et conviennent aux enfants de 10 mois et plus. A partir de quelles sensations sont créés les personnages et pour quelles histoires ?
Eudes : Les YogiToys sont nés de l’envie de réaliser un jouet qui se plie à notre imagination, au sens propre et au figuré. Des jouets flexibles ont existé dans les années 60, il s’agit donc d’une réinvention, avec des techniques très différentes nous permettant d’aller encore plus loin : on peut imprimer sur un YogiToy à peu près n’importe quel personnage. Devant cette profusion de possibilités, nous avons choisi un modèle emblématique des valeurs de la marque.
Ariane : Il s’agit de YogaCat, un chat humanoïde toujours zen et accueillant, aussi souple qu’un yogi. Nous nous sommes entre autres inspirés des cultures orientales. Lors d’un voyage en Inde, nous avons été frappés par l’omniprésence de couleurs chatoyantes… et d’effigies hindoues. Elles étaient partout, dans la rue, les tuk-tuk, les maisons. Les teintes vives et le minimalisme de nos YogiToys ne sont pas sans rapport avec ces souvenirs indiens.
Eudes : Mais nous sommes avant tout des Français amoureux de leur beau pays et de Paris. Notre second personnage est donc une Tour Eiffel. Nos #BBFL sont les bébés de la Dame de Fer et les symboles d’un Paris accueillant et décontracté, que nous souhaitons incarner dans ce personnage destiné à voyager dans les valises des touristes du monde entier.
Vous êtes soucieux des mises en situations dans l’espace comme interaction humaine avec ce qui l’entoure, ce qui l’identifie. Une sorte de doudou coloré et présent à chaque moment de la vie. Il ne s’agit pas seulement de raconter une histoire mais être dans l’histoire que l’on vie. Il s’agit presque d’une communication immersive, un lien entre le rêve et la réalité, une présence au monde douce et joyeuse. Qu’est-ce qui manque selon vous aux êtres humains pour être heureux, redevenir enfant ou ne pas se prendre au sérieux ou mettre à distance son gourou intérieur ?
Eudes : Le rapport des adultes à la créativité est complexe. Notre société s’attache à inhiber dès l’école la pensée divergente, celle qui permet de voir les choses d’un autre angle, ou d’imaginer d’autres mondes. Elle privilégie la pensée convergente, plus adaptée à l’exécution des tâches de manière efficace. Or la combinaison de ces deux modes de pensée est nécessaire à la puissance créative.
Avec YogiToy, nous souhaitons tendre une perche aux adultes qui n’ont pas l’occasion d’écouter leur enfant intérieur, de laisser libre cours à leur imagination, pour qu’ils s’aperçoivent que cette reconnexion avec une partie oubliée de leur personnalité les aide à être de bonne humeur et à instaurer un dialogue créatif avec les enfants.
La créativité est un enjeu essentiel dans le développement d’un – petit – humain. De nombreux psychanalystes comme Donald Winnicott estiment qu’elle doit d’abord être valorisée, puis relativisée sans être tournée en ridicule. Un équilibre difficile à trouver pour beaucoup de parents. On peut être dérouté par le comportement d’un enfant qui souhaite que le monde tourne autour de lui et que les histoires qu’il se raconte soit des réalités.
La réponse à la créativité d’un enfant devrait pourtant simplement être elle aussi créative ! En communiquant avec de l’humour, on l’aide à faire la différence entre son monde intérieur et les règles de vie en société, sans l’éloigner définitivement de sa pensée divergente. Cela lui montre aussi que sa créativité peut être bien plus qu’un refuge coupé du monde : une façon de dialoguer avec les autres et de se projeter dans le futur.
Ariane : Nos sociétés modernes veulent à tout prix opposer le monde des enfants à celui des adultes. Il y aurait d’un côté le jeu, le rêve, la légèreté, et aux antipodes, le travail, les responsabilités, le pragmatisme… L’art et la philosophie questionnent parfois cette vision manichéenne, mais restent souvent l’apanage d’une élite.
Je suis pour ma part persuadée qu’un individu s’épanouit en combinant toutes ces valeurs et ces émotions : celles que l’on assujetties à la jeunesse et à la vieillesse, et qui se valent. Il n’a pas besoin de rejeter en bloc ce qu’il était hier, de s’inventer un costume d’adulte. Il peut garder ce qu’il a envie de garder.
Avec YogiToy, nous développons des jouets intergénérationnels qui fluidifient les échanges entre tous les âges et tous les imaginaires. Ils ne sont pas réservés à une génération, à un genre, à un caractère, à un lieu. J’ai bientôt 31 ans et je m’amuse à faire danser et parler les YogiToys tous les jours ! Ça ne m’empêche pas de gérer la comptabilité et la stratégie de l’entreprise la minute d’après. Ce décloisonnement que nous prônons au-delà de notre projet, contribue selon moi au bonheur.
Vous communiquez sur les médias sociaux tel que Instagram, Facebook, Twitter. Quelles sont selon vous les différences majeures quand on est une jeune marque comme la votre et quelles en sont les bonnes pratiques et les limites ?
Eudes : Je laisse Ariane répondre !
Ariane : Il est très difficile d’exister sur les réseaux sociaux aujourd’hui. C’est vrai pour un individu, et plus encore pour une entreprise. On est en concurrence avec de nombreuses marques, mais aussi avec la masse d’informations continue dans laquelle se noient les utilisateurs.
S’il y a des codes à respecter propres à chaque plateforme, pour sortir du lot, il faut cibler le(s) bon(s) public(s) ; faire preuve d’exigence et de créativité pour chaque contenu ; privilégier le visuel ; déployer un ton et un univers reconnaissables… et passer par des publicités payantes. La différence majeure entre une marque installée et une jeune start-up comme YogiToy se situe donc au niveau du budget marketing !
Comment faites-vous pour rencontrer des Influenceurs, des journalistes, des personnages publics qui pourraient vous permettre de mieux faire connaître votre marque ?
Eudes : Nous en connaissons certains, sinon on y va au culot. On a par exemple offert son YogiToy à Laurent Ruquier lors d’un enregistrement des Grosses Têtes sur RTL, et il a gentiment accepté qu’on le prenne en photo avec sa mascotte personnalisée ! Pour une mise en valeur de nos produits par des influenceurs spécialisés, nous faisons confiance à YouDeo, une société française qui met en relation des marques et des Youtubeurs très suivis par des communautés bien spécifiques.
Ariane : On essaie aussi de tirer parti des événements auxquels on participe, où les influenceurs sont en général plus accessibles. Pendant le salon Maison et Objet, nous avons par exemple proposé des échanges de visibilité à tous les exposants dont nous aimions l’univers et les produits. On a fait des posts et des stories Instagram qui ont très bien fonctionné et nous ont ramené des visiteurs sur notre stand.
Quels vont être dans les mois à venir l’histoire positive que vous allez raconter à vos fans, à vos futurs acheteurs et pensez-vous passer des partenariats avec des artistes du monde des images pour créer un monde spécifique des YogiToy ?
Ariane : Nous allons étoffer les caractères de nos personnages à travers des contenus photos et vidéos toujours plus nombreux. Il s’agit de déployer un univers qui nous ressemble, à base de chats gourous, d’aliens super mignons et de voyages spatio-temporels aussi drôles que poétiques… Et dans le même temps, de montrer toutes les possibilités offertes par nos jouets flexibles.
Eudes : Nous travaillons déjà avec des illustrateurs. Nos collaborations ponctuelles sont autant d’occasions de sortir de notre univers et d’explorer l’imagination d’artistes de talent. Notre prochain YogiToy collector sera réalisé par le peintre serbe Mate Djordjevic. On profite d’ailleurs de cette interview pour inviter qui le souhaite à nous contacter pour réaliser son YogiToy à ses couleurs : nous proposons un service de figurines sur-mesure qui constituent des goodies vraiment originaux…
Vous étiez en janvier au Salon Maison & Objet, quel en a été votre retour commercial et envisagez-vous de présenter votre marque au Japon, aux USA et du ce faite, pensez-vous créer une collection spécifique ?
Ariane : Participer aux salons professionnels représente un coût assez lourd pour les jeunes marques, et pourtant ces rendez-vous sont de vrais tremplins. Nous avions réalisé des ventes sur des marchés de créateurs et via notre e-shop (www.yogitoy.com), mais c’est la première fois que nous étions confrontés à des acheteurs B2B2C. Nous avons eu des échanges très riches et des commandes. Le travail que nous avons mené sur les réseaux sociaux pendant l’événement était aussi important que celui effectué sur le stand.
Eudes : Le retour commercial a été très positif du côté des boutiques jouets, lifestyle, décoration et des boutiques de musées. Nous nous concentrons pour le moment sur le marché européen mais nous serons bientôt prêts à rencontrer des distributeurs internationaux.
Bio :
Architecte et designer, Eudes dessine aussi bien pour des start-ups technologiques que pour des agences d’architecture. Co-fondateur et président de la marque, il supervise le process de fabrication des YogiToys, prototypés dans les fablabs de Paris. Il travaille régulièrement avec des illustrateurs et des plasticiens afin d’étendre l’univers de la marque dans un esprit collaboratif.
Journaliste et vidéaste, Ariane est passionnée par les nouvelles techniques de communication. Elle a créé une plateforme digitale dédiée à l’amour 2.0 : asv-stp.fr, avant de se consacrer à la campagne de crowdfunding de YogiToy fin 2016. Elle s’est ensuite associée à Eudes, et puise dans ses expériences journalistiques et cinématographiques pour développer une marque haut-de-gamme à l’univers créatif, pop et positif.