Pour comprendre comment les établissements d’enseignements supérieurs communiquent aujourd’hui, Culture RP a souhaité relayer une tribune de Brigitte Fournier, Dirigeante de la 1ère agence de communication sur l’éducation, la formation et l’enseignement supérieur et la recherche, l’Agence Noir sur Blanc.
La communication au sein de l’enseignement supérieur représente un challenge à la fois excitant et particulièrement complexe pour les professionnels de la communication. Excitant, car nous nous trouvons à la croisée d’enjeux cruciaux et déterminants pour l‘avenir de nos sociétés et de nos enfants. Mais également complexe dans sa structure même : les secteurs ainsi que les publics concernés sont nombreux et hétérogènes, et les intérêts qui s’y rencontrent sont multiples.
L’enseignement n’est pas un bien de consommation quelconque. Faire le choix d’une formation représente un moment crucial dans la vie d’un étudiant. Un acte engageant pour son avenir, dans lequel il investit beaucoup de lui-même. Son diplôme le suivra toute sa vie notamment sur son CV. Il doit donc se reconnaître dans cet « achat », se sentir en accord avec le contenu de la formation mais aussi en accord avec les valeurs, le discours, l’histoire, l’ambiance d’une institution. Il s’agit là d’un aspect affectif, d’un attachement qui ne s’explique pas toujours de manière rationnelle et pour lequel il n’existe pas de recette miracle. Difficile, dans ces conditions, d’appliquer les règles classiques du marketing.
En 25 ans d’existence, NSB a vu évoluer ce secteur, ses contraintes et ses opportunités. Il y a 20 ans, les services de communication n’existaient pas. Aujourd’hui, une révolution a lieu tous les ans et les écoles et les universités ne cessent de relever les challenges afin de se hisser au niveau des entreprises.
En tant qu’agence spécialisée, nous constatons tous les jours à quel point les institutions de l’enseignement supérieur présentent des facettes paradoxales : si leurs objectifs et leur fonctionnement évoluent de plus en plus vers ceux des grandes entreprises (notamment dans leur compétitivité, leur communication et leur course au recrutement national et international), elles ne peuvent cependant pas en emprunter toutes les méthodes !
Prenons par exemple la communication « produit ». Les écoles et universités françaises ne communiquent pas beaucoup sur leurs formations à proprement parler. En réalité, dans le secteur particulier de l’enseignement supérieur, il s’agit d’un exercice difficile puisque la communication d’un master ou d’un bachelor ne peut pas réellement être pensée en dehors de la communication institutionnelle. La marque de l’établissement a un impact majeur sur l’image et la notoriété d’un produit. Si la marque institutionnelle d’un établissement est entachée, les répercussions sur les Marques produit peuvent être immédiates. Cette interdépendance entre marque produit et marque institutionnelle devrait obliger les institutions à communiquer de manière performante sur tous les fronts et à adopter une stratégie de marque extrêmement puissante et complémentaire pour exister.
La marque, nerf de la guerre. Un élément identitaire fort qui est le seul à pouvoir différencier les établissements de leurs concurrents. Dans l’enseignement supérieur, plus que partout ailleurs, la notoriété et l’image d’une institution influent grandement sur son développement. Et plus que dans n’importe quel autre secteur, l’attachement à une école ou à une université passe par la confiance qu’on place en elle. Cela joue un rôle primordial dans l’image d’une institution. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que les accréditations, labels et classements internationaux fleurissent dans ce secteur comme dans celui, tout aussi délicat et complexe, de la santé. La confiance et le capital de marque représentent un travail de longue haleine semé d’embuches. Chaque discours et action de communication doit trouver un écho auprès de publics très hétérogènes (des pouvoirs publics, aux anciens élèves, en passant par les étudiants actuels).
La communication doit réaliser le tour de force d’être personnalisée, adaptée à chaque public, innovante si possible, mais en restant dans le cadre particulier de l’enseignement supérieur… Avec ses contraintes politiques et financières. Ainsi, pour une agence, travailler à la communication de ces institutions exige une connaissance approfondie du milieu, des méthodologies scrupuleuses, ainsi que la capacité à élaborer des outils créatifs adaptés à chaque public. Pour l’heure, en France, les institutions restent frileuses et dans un mécanisme de mimétisme. Les outils présentent parfois une qualité insuffisante en comparaison des publics auxquels ils s’adressent : des générations de jeunes gens particulièrement sensibles à l’image, qui ont grandi avec internet et les écrans. Les vidéos de qualité, notamment les campus tour, permettent à l’étudiant étranger de se projeter dans un campus Les Ecoles américaines l’ont bien compris : elles rivalisent d’imagination et de créativité pour réaliser des vidéos ludiques. NSB a développé le modèle pour quelques Ecoles françaises mais peu nombreuses sont celles qui l’exploitent pleinement.
Aujourd’hui le développement international est incontournable pour les acteurs de l’enseignement supérieur qui doivent communiquer pour exister sur ce marché. Car il n’y a aucun doute à avoir, l’enseignement supérieur est un marché qui s’est globalisé. NSB le vit depuis plus de 20 ans en accompagnant des Institutions françaises et étrangères dans leur stratégie de communication mondiale. Le plus souvent, les écoles et universités ont compris l’importance de ce point et l’utilisent d’ailleurs comme un argument fort de leur communication. Mais elles peinent à se rendre visibles à l’international par manque de savoir-faire, de compréhension, de méthodologie et de moyens. La réflexion doit être portée en amont, et prendre une place importante au coeur même de la stratégie. Il faut savoir appréhender les expertises valorisables et les marchés pouvant être abordés. Ce qui est rarement le cas. Pour conquérir le marché de l’enseignement supérieur à l’international, il faut comprendre les raisons des flux d’étudiants, qu’elles soient conjoncturelles ou structurelles, reconnaître les opportunités en cohérence avec l’institution et communiquer en fonction. Cela demande du temps consacré à l’observation de l’environnement international et de la réactivité.
D’autre part, et il s’agit là d’un point sur lequel les écoles et universités n’ont pas la main, le cadre politique régissant les formations et cursus internationaux en France doit s’assouplir. Si la communication internationale est un incontournable nécessaire pour les établissements, elle peut aussi revenir tel un boomerang en image positive sur le marché français. Le classement du Financial Times en est un exemple concret. A l’avenir, il sera de plus en plus compliqué pour les écoles et universités de faire l’impasse sur ce point, même si pour certaines, leurs objectifs de recrutement ne se trouvent pas là. La concurrence devient donc double : sur le marché national et sur le marché international. Car l’ambition d’étudier à l’international est en pleine expansion chez les français : parents comme étudiants présentent ce point comme un argument primordial dans le choix d’un cursus. Parallèlement à cela, on observe une véritable montée en puissance des classements internationaux, outils d’information et de rassurance pour les parents et les étudiants. Il faut donc pouvoir maitriser ces classements, savoir les intégrer et les exploiter en termes de communication pour être visibles sur un marché mondial. Je fais le pari que ces classements internationaux vont connaître un développement exponentiel dans les années a à venir pour conseiller des étudiants internationaux de plus en plus mobiles et en manque d’informations.
Et dans cette communication à l’international, le digital joue un rôle incontournable. Le web abolit les frontières géographiques et bouscule les codes de l’enseignement. Ce qui ressort d’une école sur internet est le reflet de la communication globale d’une institution. Articles sur les medias digitaux, visibilité de la recherche, relation « clients » de par les commentaires sur les forums, communication produits, vidéos, réseaux sociaux etc… Travailler son influence sur les réseaux sociaux et maîtriser les outils digitaux est donc primordial, compliqué et demande des compétences certaines.
En effet, il faut connaître et savoir utiliser les réseaux sociaux du pays et dans sa langue comme Weibo en Chine par exemple.
Les répercussions sur le recrutement sont importantes, notamment lorsqu’on voit la percée de certains outils tels que LinkedIn ou la montée en puissance des chaines YouTube, portées par le buzz des vidéos créatives. Mais comme pour l’international, la question du digital a trop peu souvent fait l’objet d’une véritable stratégie en amont au sein des écoles et des universités. Pressées par un effet d’innovation et de concurrence, les institutions ont développé des outils peu qualitatifs et inadaptés aux publics visés, mis en place par des équipes peu opérationnelles. Comme les entreprises remettent de plus en plus souvent le « consommateur final » au centre de leur stratégie, le digital doit, à termes, permettre aux écoles et aux universités de recentrer leur communication sur les étudiants et leurs besoins, et ce au travers même des étudiants (principe du feedback du web 2.0).
Parution : le livre blanc « La communication dans les établissements d’enseignement supérieur ».
—–
« Put the student at the heart of communication »
Communication within higher education is a challenge that is as exciting as it is complex for communication professionals. Exciting, because we are at the crossroads of some crucial and decisive issues for the future of our societies and our children. But the challenge is complex in its structure, with several sectors and audiences coming together, each with their own interests.
Education is not a product. Choosing what and where to study represents a crucial moment in our lives. It is a commitment to the future in which we invest in ourselves. Our qualifications follow us throughout our lives, most notably on our CV. This « purchase » therefore needs to correspond to ourselves; not only should we feel in agreement with the content of the programme, we should also be in tune with the values, the arguments, the history and the atmosphere of the institution. This emotional aspect creates an attachment that cannot always be explained rationally and for which there is no magic recipe. It is difficult, in these circumstances, to apply the traditional rules of marketing.
In its 25 years of existence, NSB has seen the industry evolve, both its constraints and opportunities. Communication services in the sector did not exist 20 years ago. These days a revolution takes place every year and schools and universities find themselves facing the same challenges as companies.
As a specialized agency, we see every day how higher education institutions have paradoxical facets: even though their objectives and operations are becoming more and more like those of large enterprises – including their competitiveness, communication and race for national and international recruitment – they cannot however borrow any of their methods.
Take as an example product communication. French universities and schools do not communicate much on their actual programmes, or “products”. In reality, in the higher education sector, communicating around a master or bachelor is a difficult exercise because it cannot really be thought of outside of corporate communications. The institution’s brand has a major impact on the image and reputation of its product. If the brand is tainted, the impact on that brand’s product can be immediate. This interdependence between brand product and corporate brand requires institutions to communicate effectively on all fronts and to adopt an extremely powerful and complementary brand strategy in order to exist.
The brand is the name of the game. A strong element of identity is the only thing that can differentiate an institution from its competitors. In higher education, more than anywhere else, the reputation and image of an institution greatly influences its development. And more than in any other sector, the attachment to a school or university requires trust that is placed in it. This plays a key role in the image of an institution. It is also why certifications, labels and international rankings blossom in this sector, as in the equally delicate and complex health sector. Trust and brand equity are a long-term task fraught with pitfalls. Each discourse and communication action must strike a chord with a very heterogeneous audience (including government, alumni and current students).
Communication must achieve the feat of being customized, tailored to each audience, being innovative if possible, but within the specific context of higher education… with its political and financial constraints. Thus, for an agency, working on the communication of these institutions requires a thorough knowledge of the environment, its scrupulous methodologies and the ability to develop creative tools tailored for each audience. Currently, in France, institutions remain cautious and are reluctant to innovate. The tools are often of poor quality compared to the audiences they address: the generations of young people particularly sensitive to images, who grew up with internet and screens. Quality videos, especially campus tours, allow foreign students to get an idea of life at the school. American institutions are well aware of this: they combine imagination and creativity to produce entertaining videos. NSB has developed a model for some French schools, but few have fully exploited it.
Today, international development is essential for those involved in higher education and that need to communicate to exist in the market. For there is no doubt about it, higher education is a globalized market. NSB has seen it for over 20 years, accompanying institutions from around the world in their global communication strategy. In most cases, schools and universities have understood the importance of this issue and also use it as a strong argument for their communication. But they are struggling to make themselves visible internationally due to a lack of knowledge, understanding, methodology and resources. The thought process needs to be made ahead of time, and should be given an important place at the heart of the strategy. You need to know how to understand the valuable expertise and which markets to address. This is rarely the case. To capture the international higher education market, we must understand the reasons for student flows, whether they are cyclical or structural, recognize opportunities consistent with the institution and communicate accordingly. This requires devoting time to the observation of the international environment and responding to it.
Also, and this is a point on which schools and universities do not have control, the policy framework governing international programmes in France must become more flexible. If international communication is an essential need for an institution, it can also come back like a boomerang and leave a positive image in the French market. The Financial Times ranking is a concrete example. In the future, it will be increasingly difficult for schools and universities to ignore this point, although for some, their recruitment goals will not be found there. The competition is twofold: on the domestic market and the international market. The ambition of studying abroad is growing among the French: parents, like students, present this as a key argument in choosing a programme. Along with this, there is a real increase in international rankings, information tools and reassurance for parents and students. An institution must therefore be able to master these rankings, knowing how to integrate them and exploit them in terms of communication opportunities in a global market. I am betting that these international rankings will experience exponential growth in the years to come for international students who are increasingly mobile and who lack information on the programmes available.
Digital also plays an indispensable role in international communication. The internet abolishes geographical boundaries and challenges the established codes of education. What emerges from a school on the internet is a reflection of an institution’s global communications. Articles on digital media, visibility of research, « customer » relationships through comments on forums, product communication, videos, social networks, etc. Working your influence on social networks and mastering digital tools is therefore crucial, but requires certain skills. Indeed, you need to know how to use social networks in your target countries as well as in their language, as with Weibo in China for example.
The impact on recruitment is important, especially when we see the breakthrough of tools such as LinkedIn or the rise of YouTube channels, buoyed by the buzz of creative videos. But internationally, the digital issue has too seldom been a real upstream strategy for schools and universities. Hurried along by an increasing competition and under pressure to innovate, institutions have developed low quality tools set up by inexperienced teams and thus unsuitable for the audience. As businesses place the « final consumer » more and more at the centre of their strategy, digital allows schools and universities to focus their communication on students and their needs, which can be achieved through the students themselves using the feedback principle of web 2.0.