Cyndie Bettant, Brand, Marketing & Impact Leader Cision et directrice de publication Culture RP et Marc Michiels, rédacteur en chef Culture RP ont souhaité connaître le retour de certains contributeurs du livre Culture RP Cross Gen’.
Auraient-ils ou elles écrits le même texte aujourd’hui ? Comment, ils ou elles envisagent le futur de leur métier ? Comment souhaitent-ils ou elles accompagner la jeune génération ? Et si parler de Culture RP Cross Gen’ exprime bien l’aboutissement de ces transformations digitales successives, c’est aussi une vision d’avenir positive…
La parole est à Stéphane Billiet, Vice-Président de We Change, Professeur associé au CELSA Sorbonne Université et Président délégué du Syndicat du Conseil en Relations Publics.
Quels commentaires feriez-vous sur l’ouvrage ?
Bravo pour la forme, digeste, ouverte. Ces fragments d’un « discours amoureux de la communication » incitent à picorer la richesse de savoirs et d’expertises des contributeurs au gré de ses envies, de ses centres d’intérêt, des personnalités qu’on retrouve ou qu’on découvre.
Et merci pour le fond. Cette compilation de points de vue savamment organisés autour du fil rouge de la transformation est bien utile pour prendre la mesure des changements qui ont révolutionné nos métiers et refaçonné nos pratiques. Que de bouleversements en 10 ans, seulement !
Si vous deviez conseiller le livre Culture RP Cross Gen’ à quelqu’un, quel type de profil serait-ce et que lui diriez-vous pour le convaincre ?
En tant qu’étudiant en communication, je te conseille de lire ce livre mosaïque pour son bouillonnement d’idées, de mises en perspectives et de propositions qui te donneront des pistes d’actions concrètes pour relever les défis de la communication et t’aideront à anticiper les mutations encore à venir d’un secteur en évolution permanente.
Votre tribune “Les Relations Publics révèlent leur capacité à créer de la valeur durable” écrite en 2017, a été sélectionnée parmi les 25 dans le livre pour illustrer le voyage et les réflexions des RP ces 10 dernières années. Si vous deviez la réécrire aujourd’hui, que changeriez-vous ?
Sur le fond, je ne changerais rien ! Dans un monde technologiquement modifié, boosté à l’intelligence artificielle, la relation s’impose comme la condition sine qua non de l’efficacité de la communication. Je reste convaincu que l’ingénierie du consentement, théorisée par Edward Bernays, doit faire plus de place à l’ingénierie du consensus, fondée sur des modalités et des formats de communication plus collaboratifs, plus inclusifs, à même de créer la confiance sans laquelle rien n’est possible.
Comment définiriez-vous la “culture RP” ? Est-elle à votre sens suffisamment enseignée/transmise aux futurs communicants pour devenir “Cross Gen” ?
Les RP, c’est un état d’esprit, une sensibilité, un certain regard sur le monde et une certaine façon d’agir. C’est une culture au sens propre du mot qui s’éprouve, plus qu’elle ne s’apprend, et se transmet mieux qu’elle ne s’enseigne. La jeune génération, biberonnée aux réseaux sociaux, baigne dans la culture RP sans forcément s’en rendre compte. Beaucoup d’étudiants découvrent les métiers des RP sur le terrain. D’où l’importance de l’alternance et des stages pour réussir le “Cross Gen”. Il n’empêche, enseigner les fondamentaux théoriques des RP, et pas seulement exposer des cas, me semble indispensable – et sans doute insuffisamment proposé dans les établissements d’enseignement – pour à la fois faire préférer les RP et former des professionnels solides et évolutifs. C’est la raison pour laquelle, il y a plusieurs années, j’avais fait « Passages Obligés », un recueil (téléchargeable) de 50 fiches, conçu comme un parcours fléché à destination des professionnels qui enseignent.
Comment voyez-vous la culture RP naviguer vers l’avenir ? Quelles sont les tendances métiers en devenir, les faiblesses des RP à travailler et au contraire ses forces à sublimer ?
Les RP sont entrées dans un nouvel âge d’or ! En termes de fiabilité et de sincérité de l’information, le besoin de professionnels dignes de confiance ne peut aller que croissant alors qu’il est désormais si simple de produire et propager des infox à moindre coût. Les possibilités, actuelles et futures, ouvertes par le numérique et les mondes virtuels renforcent le besoin d’une relation incarnée et d’échanges authentiques dans le monde réel. À ce titre, les marques et les organisations qui ont communiqué de manière descendante sur leurs engagements, ont besoin des métiers de la relation pour créer du sens et du lien avec leurs publics.
Tout change mais rien ne change… La force et la faiblesse des RP sont dans la dénomination même de la discipline : établir et maintenir des relations fructueuses et durables entre les différents publics d’une organisation ne peut être que créateur de valeur… sous réserve d’avoir une vision claire de ce que ça rapporte ! Évaluer la valeur d’utilité de l’actif relationnel est la nouvelle frontière des RP. Cet horizon est atteignable si les RP musclent leur jeu et règlent une fois pour toute la question de la valeur. Ces deux enjeux, qui n’en font qu’un, trouvent selon moi leur réponse dans un « discours de la méthode » qui doit permettre, tout à la fois, de faire un meilleur usage des RP, dans la pratique, et de savoir évaluer la valeur créée in fine.
Si les RP sont une culture, le capital relationnel est une valeur.
L’arrivée des IA génératives dans la production des contenus, et les bouleversements que cela induit, ne doit pas nous aveugler. L’effectivité des RP réside ontologiquement dans leur capacité à bâtir et à faire fonctionner des infrastructures relationnelles. Les RP créent les conditions, ce qui ne peut pas se déléguer à une intelligence artificielle, contrairement à la production de contenus. Quels métiers en devenir ? De la même manière qu’il y a des data analysts, on a besoin que des relations analysts auditent et scorent l’état de la relation entre une organisation et ses publics sur des items précis. La méthode des comparables, que les financiers utilisent pour déterminer la valeur d’une entreprise en se basant sur des résultats obtenus par les sociétés qui opèrent dans le même secteur d’activité, peut tout à fait s’appliquer à la mesure du capital relationnel. Voilà bien une façon concrète de mesurer une marque ou une organisation à ses comparables au regard d’un « score de relation ».
La force des RP, c’est de penser « publics » avant de penser « outils », c’est cette dimension profondément humaine qu’on pourra d’autant mieux sublimer qu’on saura rendre compte de sa valeur.
L’IA est déjà dans toutes les têtes, comment va-t-elle impacter les professionnels des RP ? Est-ce une bonne nouvelle pour la profession ?
L’impact du recours aux IA génératives va rapidement se mesurer en termes de gains de productivité et d’intérêt dans le travail. Automatiser les tâches répétitives, chronophages, ou à faible valeur ajoutée, va permettre de réallouer le temps sur ce qui est réellement créateur de valeur. Moins de temps passé à produire des contenus basiques ou à traiter de gros volumes de données, c’est plus de temps consacré à ce qui compte vraiment : le conseil, la créativité, la gestion de la relation. La révolution de l’IA est une très bonne nouvelle pour la profession : en libérant les professionnels des RP d’une grosse partie des tâches d’exécution, l’intelligence artificielle va donner plus de poids à l’intelligence émotionnelle, si importante dans nos métiers.
Les professionnels des RP sont-ils prêts ?
Le Syndicat du Conseil en Relations Publics lance cet automne la « Saison de l’IA » que j’ai le plaisir de copiloter avec mon confrère François Gobillot, Country Manager d’AxiCom. La saison débute en septembre par un diner des dirigeants des agences membres autour de Kati Bremme, la Directrice de l’innovation de France Télévisions. En novembre, un séminaire permettra aux adhérents de se familiariser avec les applications des IA génératives dans nos métiers et de questionner leur impact sur nos structures en termes de recrutement, de formation, de facturation, d’éthique… Le point d’orgue de notre « Saison de l’IA » sera une Agora, largement ouverte à nos clients et partenaires, au-delà des agences membres. Donc nous serons prêts !
Que diriez-vous aux personnes qui doutent encore de la force de la culture RP ?
Je dirais qu’ils n’ont rien compris au monde ouvert, hyperconnecté, « VUCA » dans lequel nous vivons. Pardon d’être péremptoire mais les RP n’ont jamais été aussi adéquates pour penser la communication, sentir l’époque et agir sur la société. En tant que soft power, la culture RP est forte par essence. Elle est forte de l’intelligence de sa communauté professionnelle, il suffit de parcourir Culture RP Cross Gen’ pour s’en convaincre, s’il en était besoin. Elle est forte parce que vivante, vibrante, curieuse, généreuse. Elle est forte enfin parce que les mots des RP – opinion, influence, réputation, réseaux, communautés – se sont imposés. Les RP ont gagné la bataille culturelle !
Si vous aviez une question à poser aux auteurs ?
Attendrez-vous 10 ans pour sortir le prochain Culture RP Cross Gen’ alors que s’accélère toujours plus le rythme des mutations qui chahutent nos pratiques ?
Culture RP Cross Gen’, l’expertise clé du nouveau BRAND CULTURE MANAGER.
Vers où doit se tourner l’avenir du métier du communicant ? Quelles expertises présentes et futures lui sont indispensables ? Après des années de campagnes promotionnelles qui ne voulaient pas toujours le bien des consommateurs, la communication doit désormais regagner la confiance des publics, toujours plus exigeants, mieux renseignés, plus actifs et moins fidèles.
1min30 Plubishing / Préface : Catherine Cervoni, Consultante RP, médias et influence, experte en RP 2.0, Social media et Content marketing.
Le réenchantement de cette relation passera par le développement d’une véritable culture de marque, authentique, engagée et durable. Ce livre témoigne de 10 ans d’évolutions aussi bien sociétales, technos que métiers et permet aux communicants de tous âges, d’identifier les transformations à mener pour orienter son rôle vers le management transverse de la culture de marque.
Les auteurs :
Cyndie Bettant, Brand, Impact & Communication Leader chez Cision depuis près de 10 ans et responsable de publication du blog Culture RP, Cyndie multiplie les rencontres, conférences, interviews pour partager l’évolution de la communication et comprendre les enjeux grandissants des marques. Dans chacune de ses expériences, elle a toujours placé l’humain et les nouvelles technologies comme leviers majeurs de performance et pousse les professionnels de la communication à se réinventer avec une vision plus inclusive, plus transverse, plus stratégique et plus digitale de leur métier.
LinkedIn : https://fr.linkedin.com/in/cyndiebettant
Marc Michiels, passionné par le Japon, auteur d’une dizaine d’ouvrages entre photographie et écriture, Marc Michiels aime être là où on ne l’attend pas ! À toutes celles et ceux qui exercent dans leurs actions une singularité lumineuse et un mélange respectueux des couleurs de chacun… Il accompagne le blog Culture RP – Cision France, depuis 2016 en tant que rédacteur en chef et Content Marketing, Social Média Manager depuis 2012. La notoriété des marques aux regards de la transformation des usages et du dialogue interculturel est sa ligne de crête : « Être en résonance dans la vie, aujourd’hui, c’est entrer en vivance, c’est aussi inspirer, s’engager et rayonner au-delà d’un triptyque élégant pour formaliser une pensée complexe au service de tous… une « Brand Culture d’influence » en quelque sorte ! ».
LinkedIn : https://www.linkedin.com/in/michielsmarc/