#JaimeLaCom
Ce journaliste qui prenait le temps de s’informer avec un travail de recherche, de proposer un sujet qui le passionne et non d’être contraint.e d’écrire sur celui qui figure en TT sur Twitter, d’échanger avec des agences de presse ; ce sens même du métier de journaliste est en train de disparaître au sein des grands groupes.
Yannis Sioudan, C.E.O chez Interférence Press
Les médias n’ont de cesse d’essuyer les coups de cette génération, nommée millenials ou Z, qui délaisse les formes traditionnelles de l’information. Une mutation qui s’explique par une certaine défiance des jeunes, lassées d’accepter une vision de la société où ces derniers sont à part. Récemment, une étude du CSA a pointé du doigt un fait de société actuel : la part des personnes “perçues comme non blanches” ne représente que 14% du temps d’antenne lors d’une étude qui comprend 1450 heures de visionnage à la télévision. Ceci couplé à de nouveaux leviers de communication à l’instar de Youtube, Netflix, Twitch, Twitter, Instagram, Tik-Tok et les plateformes de streaming; le match qui s’annonce pour les années à venir laisse peu d’espoir aux médias quant à leur ancrage dans la société.
Selon la dernière enquête réalisée par l’institut Reuters, seulement 24% des français font confiance à l’information livrée par les médias. Une donnée datant de 2019, quid de ce baromètre en 2020 après le traitement médiatique en demi-teinte des gilets jaunes, du Covid-19 et de la réforme des retraites. Cette défaillance des médias s’inscrit donc à travers le temps, mais aussi une société et une génération toujours plus critique. On le voit bien avec des groupes qui se font racheter comme Mondadori par Reworld Media, la fin temporaire de magazines comme Grazia dans les kiosques, de même pour le magazine Voici, ou encore le départ d’un grand nombre de journalistes des rédactions qui a poussé ceux qui sont restés à une surproduction au cours de la crise sanitaire. Une surproduction, en sous-effectif, avec une demande toujours plus croissante quant à la course au clic et à l’audience.
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Voici ce à quoi est destinée la presse de nos jours et le remplacement des journalistes des “brand content manager”.
Le brand content manager, plus qu’un métier, une capacité à produire du contenu, et non plus de l’information. Du contenu qui répond à plusieurs besoins et exigences : en maîtriser toutes les formes (texte, vidéo et audio), être incollable concernant les KPI, SEO, CMS et autres moyens analytics, le tout avec une vision économique; car il ne faut pas l’oublier, un média reste une entreprise comme les autres. Avec donc une nécessité de créer du chiffre d’affaire. Ce journaliste qui prenait le temps de s’informer avec un travail de recherche, de proposer un sujet qui le passionne et non d’être contraint.e d’écrire sur celui qui figure en TT sur Twitter, d’échanger avec des agences de presse; ce sens même du métier de journaliste est en train de disparaître au sein des grands groupes.
Il va de soi que si les médias ne renouent pas avec leur principale vocation, informer, qu’ils n’arrivent pas à entretenir un lien de confiance entre citoyens et journalistes, le destin de groupes comme Lagardère ou Altice Média n’est que peu prometteur. Au delà de ce constat, c’est tout un système qui est remis en cause. Tout d’abord la sacro-saint e carte presse, possédée aujourd’hui par 35.000 personnes ! Ce sésame auparavant courtisé par beaucoup perd aujourd’hui son sens face aux médias pure player comme Konbini, mediapart et Slate. Courtisés par les grandes marques pour y figurer à coup de millions d’euros, ces dernières délaissent la presse papier. Les médias pure player ont ainsi réussi à sortir leur épingle du jeu tout en y trouvant un équilibre économique.
À leur tour, des magazines comme Libération, Le Parisien ou encore Le Figaro, se sont centrés sur le web en y dédiant une équipe composée de commerciaux, de brands content manager, de community managers…pour à leur tour en tirer avantage.
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Si le métier de journaliste est amené à évoluer, on se demande comment ces derniers peuvent-ils encore travailler ?
C’est pour cela que le nombre de pigistes en France en 2019 a atteint celui de 7.833, en net progression sur le nombre de détenteur de la carte presse. Des pigistes avec un statut plus précaire, contraints à plus de rendement et de collaboration avec des magazines, parfois peu considérés au regard de leur statut en rédaction. Une sorte de bulle, de crispation que certain(e)s ont décidé de percer en montant leurs propres agences de conception-rédaction ou média : Laurène Bastide avec Nouvelles Écoutes pour les podcasts, PLUME par Laurianne Melierre, le format participatif kiss kiss bank bank pour Regain Magazine et TEMPURA.
Cette jeune génération de journalistes, parfois féministes, engagé(e)s, racisé(e)s, retrouve cette connexion proche avec le peuple, perdue par les médias old school. Ici réside le mal de ces magazines qui ne sont plus tout puissant.
Une connexion qui peut-être retrouvée grâce à leur capacité à muter. De nos jours c’est une norme de voir un média sponsoriser un film, demain il sera aussi de la norme de voir un média lancer une chaîne entièrement numérique en complément de son format de base. France Télévision a d’ailleurs été poussée dans cette direction, pour France 4 et France O, jugés trop onéreux par le gouvernement. Là où réside la force des médias de nos jours c’est leur capacité à créer : des formats d’information courts, ciblés pour la jeunesse, des web séries sur Youtube ou Twitter…
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Leur force de frappe n’a jamais été affectée malgré toutes ces années et ces coups durs.
En témoigne les collaborations récentes des chaînes de télévision avec les influenceurs, afin d’attirer une nouvelle cible. Des émissions entièrement interactives comme “Click” proposée par la BBC, le lancement de la chaîne # ALAMAISON durant le confinement qui a collaboré avec la plateforme digitale Chefclub; les exemples ne manquent pas pour affirmer que ces nouveaux leviers de communication sont maîtrisés par les médias désormais.