Culture RP a rencontré René Villemure, éthicien et chasseur de tendances. Il a fondé l’Institut québécois d’éthique appliquée en 1998 et Éthikos en 2003. Il a été le premier éthicien au Canada à s’intéresser à la gestion éthique des organisations.
Bien que le terme ne soit pas courant ou même inconnu en France, le terme « Éthicien » désigne la personne qui pratique l’éthique appliquée. L’éthique se préoccupe du « juste dans les circonstances », l’éthicien est celui qui favorise le dialogue en vue de l’atteinte de ce « juste ».
Les professionnels des relations publics au Québec se préoccupent d’éthique depuis quelques années et me questionnent souvent sur des problématiques bien réelles telles : « Puis-je travailler pour un client dont je ne partage pas les convictions ? »; « Jusqu’à quel point puis-je dire (ou ne pas dire) la vérité sur un enjeu public ? ». Ces questions sont bien réelles et exigent une réflexion qui se situe bien au-delà de l’obligation légale. La réponse à plusieurs de ces interrogations peut bien être légale, est-elle éthique pour autant? Pas nécessairement. C’est ainsi que les RP sont amenés à réfléchir sur l’éthique contextuelle de leur profession. Au-delà des « tu ne devras pas » se situent les « il serait préférable que ». Le juste est une cible fuyante et exige des RP des valeurs claires, praticables et partagées. Les associations des RP et plusieurs firmes ont déjà débuté des réflexions sur ces sujets fondamentaux, il en va de la crédibilité de la profession. « Le RP est-il un relayeur d’information ou est-il un acteur de la vie publique? » est souvent la trame de fond de ces réflexions.
L’interrogation principale des RP est souvent reliée à la présence du mensonge dans l’espace public.
Les nouveaux médias web représentent aussi un terrain de réflexion pour l’éthique. Les réseaux sociaux sont-ils des outils de divertissement? De travail? De réseautage?
Contrairement à la croyance populaire qui voit en les médias sociaux une manière de s’amuser ou de créer certains liens d’affaire, je crois qu’il faille faire porter le regard un peu plus loin et d’anticiper les impacts puis les conséquences de l’usage, parfois pervers, de ces outils qui peuvent être, avant tout, de formidables outils de surveillance…
En affaire de médias sociaux, il importe de savoir que chacun de vos gestes sur le web peut dorénavant être retracé, il suffit d’y mettre le moyen. En 2012, le web représente la traçabilité universelle, l’omnimémorisation de tout ce qui est consulté ou mis en ligne.
Durant plusieurs années, des groupes de citoyens ont milité pour obtenir un « droit à la vie privée » et, curieusement, depuis l’avènement des médias sociaux, il semble que ces mêmes citoyens renoncent, souvent volontairement, à ce droit si chèrement acquis. Qu’est devenue la vie privée? Un vague souvenir… Pour les sociétés commerciales, chacun de vos gestes sur les médias sociaux est devenu un renseignement; au sens de la justice, vos tweets et vos posts pourront bientôt être considérés comme des aveux. On a longtemps eu peur de Big Brother qui surveillait tout, avec les médias sociaux, nous faisons maintenant face à Big Mother, celle qui garde tout en mémoire… Il faut comprendre que ce ne sont pas les médias sociaux qui sont dangereux, pervers ou non-éthique, c’est plutôt l’utilisation faite par certains qui défie le bon sens…
Rappelez-vous que tout ce que vous y inscrivez pourrait être rendu public. Puis, repensez-y une autre fois avant de cliquer « partager »…