David Martinez – Communication & RP
Du marketing éthique oui… mais du marketing !
Les spécificités des RP associatives.
Entre lobbying ou plaidoyer, sensibilisation et appels aux dons, tout en gardant leur spécificité associative, les relations presse dans le milieu caritatif n’ont rien à envier aux techniques RP des grandes entreprises.
Les clichés ont la vie dure et pourtant, il est loin le temps où les french doctors s’improvisaient porte-parole et mobilisaient les médias sur la seule base de la générosité, du militantisme et de la bonne volonté. Avec des bailleurs de plus en plus attentifs à la bonne utilisation des fonds et à la pertinence des programmes, les ONG ont vu leurs pratiques se « rationnaliser » et se professionnaliser y compris dans leur communication.
Certes les fondamentaux sont toujours là et les besoins des bénéficiaires constituent la ligne directrice des prises de paroles. Mais avec la multiplication des acteurs associatifs et plus particulièrement en cette période de crise, les RP associatives s’inscrivent aujourd’hui dans des stratégies globales de communication et de marketing.
Communiqués, dossiers de presse, événements, les ONG utilisent toute la palette d’outils comme toute entreprise ou institution. Elles aussi ont la nécessité d’affirmer la marque de manière à être rapidement identifiées lors de la diffusion de reportages par exemple. La présence du logo (sur le gilet, sur le drapeau, sur un mur,…) et la répétition du nom de l’association n’ont plus de secret pour les attachés de presse.
Vendre du témoignage
Si les associations ont parfois la chance d’avoir une activité en rapport avec l’actualité nationale ou internationale, les relations presse ne sont plus utilisées de manière ponctuelle. Les associations ont bien compris la nécessité de maintenir des liens réguliers avec les rédactions et savent se rendre incontournables. Aussi font-elles preuve de créativité pour rester présentes tout au long de l’année et fournir des informations pertinentes. Elles le font en s’appuyant sur des calendriers internationaux (journée mondiale de l’eau, journée internationale de la paix,…) ou des rendez-vous ponctuels ( salons, forums,… ) ou de manière plus opportuniste en rebondissant sur l’actualité.
Les associations ont bien compris qu’en pleine crise du Darfour surmédiatisée, il était inutile de tenter de « vendre du Congo » à une rédaction. Même en cas de crise humanitaire, les associations ont appris à composer avec les unes et les calendriers rédactionnels. D’où la nécessité de faire preuve d’imagination et de démultiplier les moyens d’attirer les médias pour les mobiliser sur une cause « oubliée ».
L’une des forces des associations, c’est leur connaissance terrain et leur capacité à fournir des témoignages forts et pertinents. Pour les rédactions ne disposant pas de correspondant sur place, les expatriés et les bénéficiaires sont des interlocuteurs privilégiés. Tout comme pour les entreprises, ces prises de paroles permettent aux associations d’affirmer leur expertise tout en assurant leur visibilité.
C’est ainsi qu’on va solliciter les rédactions pour le témoignage d’un expatrié de retour de mission, proposer une intervention plateau, un direct par téléphone ou mieux organiser un voyage presse dans le cadre d’une opération spéciale.
Et dans le cas de crises fortement médiatisées, de plus en plus d’ONG détachent sur place un « press officer » chargé de faire la promotion des ONG, proposer des sujets aux médias et faire le lien entre journalistes et expatriés.
Des prises de paroles plus libres qu’en entreprise ?
Se pose alors la question du message. Contrairement à la vision angélique d’une parole associative libre et rebelle, les associations doivent tenir compte de nombreux paramètres et trouver un juste équilibre entre la réalité terrain et les contraintes d’une stratégie de communication plus globale. Témoigner, dénoncer et faire du lobbying ? Gagner en visibilité et appuyer les campagnes marketing ?
Si la plupart basent leur communication sur le principe de neutralité et d’impartialité, elles doivent cependant rester très vigilantes. Ce sont parfois des prises de parole qui dérangent. Elles peuvent être risquées. Soit directement pour des raisons de sécurité ou soit, comme en communication politique, en s’aliénant une partie des ses soutiens.
Si les press officer sont amenés à gérer le « choc des cultures » entre un journaliste contraint par un format et les demandes de sa rédaction et un expert souvent passionné par son sujet, ils sont également les garants du discours institutionnel de l’association qui se décline à l’international. A l’heure où les techniques Internet permettent à chacun d’être son propre reporter, de nombreuses associations ont été amenées à se positionner sur des valeurs et un discours corporate commun à l’ensemble des membres de l’association (bénévoles, expatriés, salariés,…).
Quelles soient nationales ou internationales, pour les associations, les relations presse représentent un enjeu majeur dans les prises de parole en public. A l’instar d’autres acteurs privés ou institutionnels, les dirigeants associatifs travaillent leurs éléments de langage, ils soignent leur image et s’inscrivent à des séances de médiatraining. Les relations presse sont devenues un des leviers incontournables des politiques de communication et de fundraising et les attachés de presse associatifs n’ont rien à envier à leurs homologues du secteur marchand.
Au contraire, compte tenu des enjeux politiques et économiques auxquels ils sont confrontés chaque jour, de leurs terrains d’action délicats voire dangereux, les attachés de presse du secteur marchand pourraient même apprendre de la diplomatie dont doivent faire preuve leurs homologues associatifs.