Matière à réflexion : Bernard Petitjean et Corinne da Costa – Seprem Etudes & Conseil
De plus en plus autonomes, informés et opportunistes, donc potentiellement infidèles, les consommateurs sont aussi de plus en plus sensibles aux offres d’abonnement qui concernent désormais une multitude de produits et services. Décryptage d’une apparente contradiction.
L’abonnement n’a longtemps concerné que des secteurs pour lesquels il s’imposait « par défaut » et non en raison de ses avantages : comment lire un magazine ultra spécialisé lorsqu’on habite en zone rurale ? Comment accéder à l’énergie ou aux réseaux téléphoniques sans accepter de passer un contrat avec les fournisseurs concernés ? Comment trouver une place d’opéra sans être abonné alors que l’offre est très inférieure à la demande ? Comment visionner les films récents et suivre les grands événements sportifs sans en passer par les conditions commerciales de Canal + ?
Mais la nécessité n’explique pas complètement l’incroyable développement de l’abonnement. On peut désormais s’abonner au cinéma et aux salles de sport, aux romans sentimentaux des collections Harlequin, mais aussi pour recevoir régulièrement des couches culottes, des courses de base, des bouquets de fleur, de l’eau minérale, des lentilles de contact, des paniers de produits frais préparés par les AMAP, des chaussettes, des aliments pour animaux, des préservatifs, des « box » aux contenus variés (cf « Matière à Réflexion » N° 158) et même de vraies lettres avec de vrais timbres écrites à la main par de vrais gens …
Ce succès de l’abonnement a des explications rationnelles telles que l’attrait pour une promesse de prix réduit par rapport à l’achat ponctuel et la suppression du déplacement.
Mais c’est l’irrationnel qui l’explique le mieux : la suppression de la décision face à « l’hyper choix », l’attachement aux marques, l’impression d’optimiser son pouvoir d’achat, le fait d’être connu et reconnu, ou encore « l’effet wahou ! » que provoque l’ouverture du paquet et la découverte des petites surprises réservées aux abonnés.
Pour les entreprises qui décident de mettre l’abonnement au cœur de leur stratégie, les bénéfices sont nombreux : ce sont les clients qui font la trésorerie ; leur fidélisation dans la durée permet à l’entreprise de consacrer des moyens plus importants à la transformation de prospects en nouveaux clients ; l’abonné oublie le prix et perd l’habitude de comparer ; l’étude de ses comportements permet d’anticiper les changements de consommation et de définir de nouvelles offres ; enfin, comme il est toujours plus compliqué d’agir que de laisser faire, la reconduction tacite des abonnements est forte.
Le développement de l’abonnement n’est pas un phénomène de mode mais une tendance lourde, portée par des comportements et attentes de consommateurs déjà anciens ainsi que par les possibilités offertes par Internet et le « datamining ». Ce n’est pas non plus un épiphénomène : selon l’INSEE, 30% des dépenses des ménages sont aujourd’hui pré-engagées.
Qui pourra en profiter demain ? Tous ceux qui proposent des produits et services très ciblés et, plus particulièrement, ceux qui ont déjà une vraie culture de l’abonnement. Les médias ne sont pas les plus mal placés.
Bernard Petitjean ([email protected])
et Corinne da Costa ([email protected])
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