Tribune de Christophe Ginisty, patron du Digital pour le Benelux aux sein de l’Agence Ketchum. Professionnel des relations publiques, il est le créateur du cycle de conférences ReputationTime, fondateur de l’agence Rumeur Publique, il a été également European Digital Evangelist chez Edelman. En 2013, il fut élu président de l’International Public Relations Association (IPRA).
A force de dire que le digital a tout changé, que les réseaux sociaux ont bouleversé les équilibres de l’influence, les bouleversements que nous observons depuis près de plus de 10 ans avec l’apparition du web social au début des années 2000 mettent désormais tous les professionnels des RP face à tout nouveau défi.
Ne croyez pas avoir réglé la « question » digitale en envoyant quelques communiqués à une ribambelle de blogueurs assoiffés de reconnaissance et en tweetant comme un fou. Ne croyez pas non plus avoir réussi à avoir touché votre audience en produisant une vidéo unilatéralement qualifiée de virale avant même d’avoir été tournée.
En quelques années, nous sommes passés de l’ère de la diffusion à celle de l’impact.
La multiplication des médias traditionnels, en ligne et sociaux, l’infernal vacarme des conversations sur les réseaux, la prolifération des contenus en tout genre, tout ceci conduit les consommateurs à un zapping incessant. Cela va tellement vite et les contenus sont tellement nombreux que presque rien n’est mémorisable. Une info en chasse une autre, de même qu’une photo, une vidéo, un article. A la fin de la journée, on a eu beau diffuser une communication reprise par tout un tas d’influenceurs, il n’est pas certain que nous aurons eu un impact.
On peut le reconnaître avec un brin de nostalgie : les influenceurs ne le sont plus. Ou plutôt, celles et ceux sur qui nous nous appuyions pour toucher nos cibles perdent chaque jour un peu plus leur faculté à modifier les comportements de ceux à qui ils s’adressent. Et ça ne va pas aller en s’arrangeant.
C’est un énorme challenge pour les professionnels des RP car, dit en d’autres termes, cela signifie que ce sur quoi ils misaient pour réussir leurs campagnes – la dimension hors média – devient de plus en plus inopérant.
Dans les mois et les années à venir, ils n’auront pas le choix. S’ils veulent conserver leur leadership dans l’établissement des relations de confiance avec un public donné, ils vont devoir doper leurs campagnes, les porter par du contenu très fort générateur d’émotions, réaliser des media plannings sophistiqués, et par de l’achat d’espace. Sans pour autant céder aux codes de la « réclame » qui seraient tout à fait hors de propos, ils vont devoir muscler leurs stratégies en adoptant ceux de la publicité.
S’ils ne le font pas, ils risquent de continuer à s’escrimer pour, au final, de bien piètres résultats en termes de sensibilisation de l’opinion. Et sans résultat, leur modèle économique n’est plus viable.
Je n’ai jamais été de ceux qui ont prédit que les RP étaient mortes ou risquaient de l’être à court ou moyen terme. Je crois par contre que ce que nous appelons encore aujourd’hui RP n’a rien à voir avec ce que nous appellerons RP demain.
De très nouveaux moyens d’action devront être proposés par ces professionnels de l’influence et de nouvelles compétences devront être acquises pour optimiser la visibilité de leurs campagnes et sortir du lot dans un environnement encombré à l’extrême.
Et la puissance des techniques publicitaires sera d’un précieux renfort.
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