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« Notre connaissance du passé, des grands changements qui se sont déjà opérés, nous permet de mieux anticiper dans certains cas, et surtout de prendre du recul et de la hauteur, d’être réalistes dans nos estimations et nos modélisations. »
Emmanuelle Olivié-Paul Directrice Associée de MARKESS by exægis
MARKESS by exægis est un cabinet d’analyses de marché et d’études prospectives, expert des marchés du numérique et des stratégies de transformation digitale des entreprises et administrations.
La société se positionne sur des segments de marchés dynamiques tels que ceux du Cloud Computing, de l’Expérience Client, du Marketing Digital, des RH, de la Digitalisation de Processus Métier, de la Confiance Numérique, ou encore de l’IA et de l’IoT. La société dispose en outre d’expertises sectorielles (Secteur Public…). De son côté, exægis qui a fait l’acquisition du cabinet en mai 2018, est un acteur unique et indépendant spécialisé sur le marché français du numérique (notation d’entreprises & de startups du numérique, missions de « corporate development », visions prospectives & stratégiques…).
Culture RP a voulu en savoir davantage sur ces thématiques auprès d’Emmanuelle Olivié-Paul, Directrice Associée de MARKESS by exægis.
Pour moi, le terme de conviction anime votre parcours, l’énergie que vous déployer pour nous convaincre de l’absolue nécessité de bâtir une réflexion stratégique sur des enjeux métiers, permet d’établir un climat de confiance immédiat. Quelles sont alors les recommandations, les bonnes pratiques que vous conseillez aux entreprises pour améliorer l’expérience et l’engagement client avec le digital ?
Les approches novatrices et performantes que nous relevons dans ce domaine, à travers les milliers d’entretiens que nous conduisons chaque année auprès de professionnels, sont très protéiformes. Elles dépendent beaucoup du contexte des entreprises, de leur écosystème, de leur profil de clientèle et de l’urgence aussi à mieux intégrer le digital face à une concurrence accrue ou nouvelle, qui n’a plus de frontière par ailleurs dans certains cas.
Il n’y a pas de modèle unique en matière d’amélioration de l’expérience et de l’engagement client. Il existe néanmoins des éléments communs que nous retrouvons chez les plus matures d’entre elles, celles qui réussissent à anticiper les ruptures et changements majeurs dans leur modèle d’affaires, et notamment ceux induits par le digital : culture et écoute de la voix du client, grande agilité et réactivité grâce au recours notamment à l’automatisation de processus ou de tâches récurrentes à faible valeur ajoutée, approche globale et non silotée des interactions clients, organisation centrée sur la donnée client, maîtrise active des modes d’échanges collaboratifs, peer-to-peer et sociaux, démarche itérative par expérimentation sans a priori pour industrialiser ensuite si succès, anticipation par des processus de veille intelligente (benchmarks, analyses de marchés, de tendances et d’impacts potentiels associés)…
Si vous deviez citer LA grande évolution de votre métier ces dernières années, ce serait laquelle ?
Au même titre que les professionnels que nous interrogeons, font face avec le digital à de profonds changements dans leurs modes opératoires (aussi bien internes qu’externes), notre métier d’études stratégiques et d’analyse de marché se transforme aussi à plusieurs niveaux. En premier lieu, dans les méthodes de collecte et d’analyse des données. Nous ne pouvons plus nous reposer seulement sur les approches traditionnelles à base d’enquêtes classiques ou en ligne.
Celles-ci restent bien sûr incontournables, d’autant plus sur des sujets très prospectives comme le sont les nôtres. Elles doivent désormais être combinées avec d’autres méthodes permettant de mieux tirer parti des données du web et des réseaux sociaux, ou encore de supports et médias électroniques communiqués par les entreprises. Il est cependant nécessaire pour les identifier, les analyser et en sortir des données utiles à nos analyses, de s’appuyer sur des outils technologiques appropriés (solutions d’analyse sémantique, d’analyse de données non structurées ou encore à base d’intelligence artificielle). Nous disposons d’équipes techniques au sein d’exægis qui travaillent sur des projets de ce type.
En second lieu, dans les formats de restitution des données que nous collectons et que nous analysons : il faut que ceux-ci soient intégrés et digérés rapidement, facilement accessibles et ré-exploitables. Nous parlons de plus en plus d’insights ou de « snackable content ». Les rapports de plus de 100 pages sont dépassés. Nos clients ont peu de temps pour lire et décider, ils veulent aller à l’essentiel, trouver rapidement la donnée ou la recommandation clé, y accéder à la demande. Nous avons un portail web, avec des fonctionnalités de recherche avancée, permettant à nos clients d’accéder en libre-service à toutes nos analyses et études mutualisées publiées depuis plusieurs années. Il faut aussi que ces analyses soient visuelles pour être mieux captées et ‘digérées’ : nous restitutions beaucoup de nos données sous forme d’infographies ou d’illustrations.
Vous réalisez des milliers d’entretiens au service de vos analyses prospectives à destination des professionnels du marché. En quoi cette démarche permet de garantir des résultats de recherche ancrés dans la réalité du marché français et que permet-elle in fine pour les décideurs et les responsables marketing ?
Nos analyses et nos recherches s’appuient bien sûr sur les milliers d’entretiens que nous conduisons chaque année auprès de professionnels au cœur des problématiques que nous étudions et décisionnaires sur leur périmètre en France. Ces entretiens nous permettent, à partir de définitions et de questions très structurées, de cadrer nos analyses et de suivre un processus méthodologique cohérent et contrôlé. Ces entretiens ne sont pas cependant notre unique source d’informations.
Comme évoqué précédemment, nous complétons les données ainsi collectées par d’autres en provenance de ressources tierces et surtout par des analyses très fines de l’écosystème des prestataires qui œuvrent sur les marchés que nous suivons en France. Sur ce registre, nous développons des synergies avec la société exægis qui, à travers son programme de notation de prestataires du numérique, remonte des données qui peuvent nourrir de manière agrégée nos analyses de l’écosystème des prestataires (éditeurs, ENS, agences digitales, hébergeurs, telcos, cloud providers, startups du numérique…).
En retour, nous pouvons les alimenter sur ceux que nous suivons de notre côté. Rien que pour le marché français de l’expérience client, nous suivons et mettons à jour les données de plus de 200 prestataires chaque année. Nous tirons par ailleurs parti des données historiques dont nous disposons sur ces marchés. Nous suivons par exemple le marché de l’expérience client depuis plus d’une dizaine d’années. Notre connaissance du passé, des grands changements qui se sont déjà opérés, nous permet de mieux anticiper dans certains cas, et surtout de prendre du recul et de la hauteur, d’être réalistes dans nos estimations et nos modélisations. Cette démarche permet aux décideurs et responsables du marketing d’appuyer leurs décisions sur des données de qualité, estimées à partir de différentes sources combinées entre elles. Ces données sont en outre suivies dans le temps ce qui permet d’effectuer des comparaisons d’année en année, en affinant et en faisant évoluer nos segmentations de marché lorsque cela est nécessaire.
Vous avez présenté lors du salon Stratégie Clients une étude intitulée « la robotisation et l’IA au service de l’humain pour une meilleure expérience client ». Si 78% des professionnels interrogés sont convaincus que l’usage de la l’I.A peut améliorer l’expérience client. Quels sont les objectifs visés et les freins à lever ?
Cette étude, réalisée en co-partenariat avec le salon Stratégie Clients, s’intègre dans le cadre de notre programme de recherche continue sur l’expérience client et les stratégies digitales dont vous pouvez retrouver des extraits d’analyse sur notre blog (blog.markess.com). Cette étude est le prolongement de premières recherches lancées il y a 3 à 4 ans déjà autour du sujet de l’IA dans l’expérience client. Nous avions notamment investigué le domaine du marketing automation et de l’attribution marketing, ainsi que du selfcare avec les chatbots. Nous souhaitions cette année aller plus loin, et surtout comprendre comment les professionnels du marketing, du digital, du commerce et de la relation client tirent parti de l’IA pour accompagner et aider l’humain à vivre une meilleure expérience client.
Les objectifs visés sont multiples parmi lesquels, pour plus de 50% de ceux que nous avons interrogés, figurent la suppression des tâches manuelles récurrentes à faible valeur ajoutée permettant de libérer du temps aux collaborateurs pour le consacrer aux aspects de la relation client, l’accélération de processus clients, l’amélioration de la connaissance client par la donnée et la réduction de certains coûts. Ces professionnels craignent cependant en regard une éventuelle déshumanisation des relations, l’inconfort des clients dans l’échange avec une machine et leur possible peur de se sentir « manipulés » ou dépossédés de la maîtrise de leurs choix (neutralité, éthique…).
D’ici 2020, 36% des décideurs comptent recourir à des assistants vocaux pour automatiser certaines interactions, dialogues ou conversions avec leurs clients et prospects. Que pensez-vous de ces outils, sont-ils tous « matures » et quelles peuvent être leurs évolutions ?
La maîtrise de la voix sera sans aucun doute l’un des enjeux majeurs des prochaines années en matière d’expérience client. Nous sommes aux prémices des projets. Les solutions actuelles sont perfectibles. Cela va cependant très vite. Les assistants vocaux, les callbots, les voicebots et tous les projets déclinables à base d’IA et de ML autour de la voix sont porteurs d’usages concrets : aide aux personnes âgées en proie à des difficultés face à la technologie, utilisateurs déficients visuellement, possibilité de combiner une activité en parallèle… Chez MARKESS by exægis, à travers les résultats études que nous conduisons sur ces sujets, nous sommes convaincus que les nouvelles formes d’automatisation liées à la voix constituent un réel levier dans l’éventail des outils d’amélioration l’expérience client. Il faut cependant rassurer quant aux exploitations tierces possibles et surtout garantir l’usage des données à caractère personnel qui en est effectivement fait.
Avez-vous une conviction à faire passer dans ce domaine ?
Nous touchons de plus en plus à des dimensions qui vont au-delà des aspects technologiques stricto sensu autour de ces thématiques et qui relèvent plus des domaines éthiques et sociétaux, sans oublier le réglementaire qui est incontournable. Ces projets doivent aussi intégrer dès le début ces aspects.