Culture RP a rencontré Julien Lacheray – Casual Community, une structure indépendante de communication digitale.
« le contenu demeure la source
de valeur principale des flux »
Pouvez-vous nous définir le périmètre d’intervention d’un Social media manager freelance?
Le social media manager freelance intervient au sein d’organisations pour gérer d’un point de vue stratégique l’utilisation des réseaux sociaux. Si on devait trouver une comparaison, ce serait le premier ministre du gouvernement dont les ministres seraient assimilés aux community managers. Le premier ministre tout comme le social media manager doit rendre des comptes au top management ou au président. Le rôle du social manager est de trouver les meilleures opportunités pour une marque sur les réseaux sociaux, c’est à dire où aller, et ensuite définir une stratégie de contenus, quoi dire. Le social media manager doit ensuite analyser les performances et guider les community managers dans leur activité quotidienne. Il doit créer du lien entre les sujets et donner du sens à l’utilisation des réseaux sociaux dans l’organisation.
Quelle est la différence avec le rôle d’un Gestionnaire des médias sociaux (Community Manager)?
Le community manager est dans l’opérationnel, il s’occuper de rédiger, modérer, répondre… Toutes ses activités doivent respecter les recommandations et guides édictées par le social media manager. Alors, on ne va pas se mentir, les social managers sont généralement d’anciens community managers qui ont fait grandir leur communauté et justifié une augmentation de ressources pour les accompagner. Community manager et social media manager travaillent main dans la main, l’un de façon opérationnelle et quotidienne, l’autre de façon stratégique et analytique. Le rôle de social media manager est donc très adapté à l’activité de freelance car il ne nécessite pas d’être au quotidien au sein de l’entreprise et il peut prendre du recul dans son analyse des performances.
Vous vous êtes occupé de clients variés comme entre autres : le groupe Lafarge dans l’accompagnement de la direction de la communication sur des thématiques de communication digitales et mobilité. Adidas Originals comme Community manager de la FanPage, et Comme un camion comme rédacteur pour ce blog de mode homme. Quelles sont selon vous les bonnes pratiques et que cela a-t-il changé dans votre vision de la profession?
Quelques soient les secteurs d’activité le contenu demeure la source de valeur principale des flux. Il faut être en capacité de créer du contenu pour animer des communautés. Ce contenu ne doit pas être uniquement centré sur l’entreprise, surtout pas. Les médias sociaux offrent la possibilité de sortir des schémas de communication classiques, je dis tu écoutes, et ils permettent aux entreprises de raconter des histoires, d’emmener leurs abonnés dans des endroits inattendus. Je suis assez bluffé par exemple par l’activité sociale de Maersk Line, une entreprise de shipping. A priori, ce n’est pas sexy le shipping, mais eux grâce à leur activité sur les réseaux sociaux réussissent à vous faire vivre leurs métiers d’une façon terriblement socialmedia–génique – c’est à dire qu’ils réussissent à créer des contenus qui s’adaptent parfaitement aux réseaux sociaux – pour parler d’eux. Ils disent volontiers que pour s’occuper des médias sociaux il faut arrêter de recruter des marketeurs et embaucher plutôt des journalistes.
Selon vous, l’économie de l’influence est-il un modèle pérenne et comment peut-on définir un influenceur aujourd’hui?
Vous faites surement référence au mémoire de fin d’étude que j’ai rédigé en 2009 intitulé L’influence : convergence symbolique et économique dans la blogosphère. D’un point de vue purement pragmatique on peut dire que l’économie de l’influence a permis de créer des emplois, à la fois chez les blogueurs/influenceurs/instagramers qui ont trouvé une façon de se rémunérer mais aussi au sein d’agences presse ou encore dans certaines grandes organisations qui se sont dotées de responsables relations influenceurs. Même si le schéma de l’influence évolue rapidement, on peut remarquer qu’une certaine stabilité s’est installée. Les acteurs sont reconnus et l’introduction de nouvelles parties prenantes se fait au compte goutte, signe que la structure globale de cette économie a trouvé un équilibre. C’est une économie qui a au maximum 10 ans, j’attendrais donc encore un peu pour juger de sa pérennité. Quant à la définition de ce qu’est un influenceur, il faudrait plusieurs heures pour vous en donner les contours. Mais si on devait tenter une courte définition, je dirais qu’un influenceur se distingue par sa capacité à provoquer auprès de son lectorat ou de sa communauté une adhésion autour d’une idée, d’un avis, d’un produit.
Christophe Ginisty s’interrogeait sur la question de la création d’un Club du Community Management Stratégique, qu’en pensez-vous?
Je n’étais pas au courant de cette initiative. Si cela peut créer de la compréhension autour des métiers du community management et les faire sortir des préjugés qui malheureusement parfois entourent cette profession, je suis pour.
Didier Heiderich, président de l’Observatoire International des Crises répondait dans le blog Culture RP commentait l’une de ses affirmation : « il est nécessaire d’abandonner le principe même de « communication de crise » et de passer à l’étape suivante : les Relations Publics en situation de crise ». Qu’en pensez-vous?
J’ai eu Didier Heiderich comme professeur pendant mes études. Je le reconnais bien là. Une évidence aujourd’hui, une situation de crise sera toujours accompagnée d’un nombre conséquent de conversations sur les réseaux sociaux. Que ces conversations soient indignées, moqueuses, soucieuses… le grand public commentera forcément une situation de crise sur Facebook, Twitter. Dans ce sens, il est nécessaire d’inclure dans une réponse à une situation de crise, une composante conversationnelle.
Finalement, ne s’oriente t-on pas vers une nouvelle fonction pour les grands comptes à savoir le Social Planneur Stratégique de L’Opinion?
Cela fait beaucoup de concepts réunis. Ce qui est sûr c’est qu’un gestionnaire de communauté doit être à l’écoute de celle-ci. Lorsque l’on travaille de près ou de loin avec les réseaux sociaux, il faut comprendre que l’on est à une position intermédiaire, entre son entreprise dont on doit défendre les intérêts, et sa communauté dont on est l’ambassadeur auprès de l’organisation pour laquelle on travaille. On est au poste frontière, et on est le garant de la bonne circulation des flux qu’ils soient ascendants ou descendants. Donc en effet, le côté analyse et prospective du planeur est quasiment induit par cet écosystème.