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« L’information en continu nous donne l’impression d’être au cœur de la nouvelle ; cependant, son instantanéité et son absence de recul rendent difficile, voire impossible, de se faire une idée ou de se forger une opinion, hyper-médiatisés, nous le sommes tous, sous-informés, nous le sommes trop souvent aussi… »
René Villemure est un éthicien.
René Villemure est un éthicien, un philosophe et un conférencier international reconnu. Premier éthicien au Canada hors de l’université à se consacrer à la gestion éthique des entreprises publiques et privées, il a reçu un doctorat honorifique de l’université du Québec à Trois-Rivières pour sa contribution au progrès de la société en matière d’éthique.
A l’occasion de la sortie de son livre « L’éthique pour tous… même vous ! » Ed de L’homme, nous avons voulu vous présenter quelques passages pour donner un aperçu choisi parmi une table des matières, délimitant ainsi les enjeux et les perspectives du rôle de l’éthique dans nos sociétés contemporaines !
René Villemure pourquoi ce livre ?
Le livre a été pensé et écrit afin de faire sortir l’éthique de l’université et de la présenter au plus grand nombre. Il faut mieux connaître l’éthique parce que tous, nous avons des choix à faire et que le cadre de ces choix ne relève pas toujours de la conformité. Le livre n’a donc pas prétention à « remplacer » les ouvrages universitaires mais plutôt à les compléter en rendant l’éthique accessible à tous.
« L’éthique, c’est le juste au-delà de la conformité ;
l’éthique, c’est le juste dans les circonstances.
L’éthique, c’est le juste et pas que pour les politiques ou les dirigeants.
L’éthique, c’est le juste … pour tous ! »
Pourquoi avoir choisi cette phrase en toute fin de l’ouvrage : La sagesse consiste à savoir séparer la convoitise des biens qui périssent de la conquête du coeur, qui elle, demeure ?
La phrase que vous évoquez, relève du dire poétique. Elle est une manière de mieux dire qu’il faut savoir choisir ses combats et que les seuls combats qui valent sont ceux du cœur !
Parce que l’éthique ne saurait être réduite à la conformité, qui n’est, après tout, que de l’éthique de comptable, j’ai tenté, tout au long du livre, de présenter l’éthique sous l’angle de la linguistique tout en y ajoutant une touche de poésie !
Morceaux choisis par la rédaction :
… Dans le monde de l’entreprise, lorsqu’on discute d’éthique, on pense souvent aux conflits d’intérêts, ou encore à la corruption ou au harcèlement. Encore une fois, on évoque plus fréquemment les formes des manquements à l’éthique que l’éthique elle-même. On voit souvent l’éthique comme un remède alors qu’elle devrait plutôt être comprise en amont comme étant un art de vivre, de gouverner et de guider tant nos relations les uns avec les autres que la conduite des affaires. Pour l’illustrer au moyen d’une métaphore médicale, disons que l’éthique consiste en la connaissance de ce qu’est la santé et non pas en la connaissance du remède à un mal quelconque.
L’éthique, c’est un peu moins de soi et un peu plus des autres.
On a beau croire avoir tout vu ou tout entendu parce qu’on a été bombardé d’images en continu ou qu’on a navigué six heures par jour sur les médias sociaux, ce que l’on voit dans les médias et sur le web ne représentera toujours que le regard d’un autre sur un monde qui est le nôtre.
« Dire, sans agir ne sert à rien. »
Un ami spécialiste du web me disait récemment que les internautes en général ne lisaient que l’introduction d’un texte avant d’être happés par un hyperlien qui les mène à un autre texte, à une autre introduction et à un autre hyperlien… Comment peut-on, en accumulant ainsi les introductions, comprendre un enjeu ou un problème ? Comment peut-on comprendre quoi que ce soit en ne superposant que les introductions et jamais les développements ni les conclusions ?
« Les mots ne sont pas une coquetterie ; ils sont le vecteur de la compréhension. »
L’information en continu nous donne l’impression d’être au cœur de la nouvelle ; cependant, son instantanéité et son absence de recul rendent difficile, voire impossible, de se faire une idée ou de se forger une opinion, hyper-médiatisés, nous le sommes tous, sous-informés, nous le sommes trop souvent aussi.
Combien d’individus arrivent au travail, chaque matin, en énonçant l’opinion d’un autre comme étant la leur ? Combien arrivent au bureau sans même avoir réalisé que l’opinion qu’ils considèrent comme étant la leur n’est pourtant que celle d’un blogueur ou la manchette d’un média en ligne aperçue furtivement ? Que leur opinion n’est qu’une phrase entendue à la radio dans les 30 secondes que certaines stations consacrent à l’information ? Aurait-on, au fil du temps, confondu l’acte de raisonner avec celui de résonner ?
« L’éthique fait peur parce qu’elle est un pari sur les gens plutôt que sur les règles. »
Pourquoi avons-nous cessé de nous questionner et tenons-nous tout pour acquis ? Pourquoi accordons-nous foi à tant d’idées reçues, exprimées ou pensées par d’autres ? Il est facile de constater qu’il ne suffit pas de vivre dans un monde médiatisé et mondialisé pour être ouvert et sensible à la réalité et à la culture humaine. Force est de constater que plusieurs personnes sont autres qu’elles-mêmes, que leurs pensées sont celles d’un autre et leurs passions, des citations.
Pour Citer Oscar Wilde : « Rien ne semble plus rare aujourd’hui pour un homme qu’une opinion qui soit de lui. »…
… Mais qu’est-ce qu’une opinion ? A l’origine, l’opinion consistait en une croyance, imaginaire ou fausse ; elle indiquait également le sentiment que l’on avait de quelque chose. De ce sens historique, le mot « opinion » a évolué jusqu’à désigner maintenant « l’assentiment de l’intelligence à une proposition ». En théorie, et en quelques mots, l’opinion correspond au jugement de valeur, combien de ces « opinions » entendues quotidiennement ne sont que le fruit du bruissage, de la rumeur ou de la paresse intellectuelle ? D’ailleurs, combien de gens pensent réellement lorsqu’ils affirment : « Je pense que… » ?
« Comprendre, c’est saisir l’ensemble de ce qui est en jeu. »
En définitive, il est inquiétant de remarquer qu’au fond peu de gens ont réellement une opinion personnelle ; plusieurs semblent avoir troqué celle-ci pour une opinion publique, cette dernière n’étant qu’une pensée convenue qu’il faut énoncer en public ou, pire, le reflet des attitudes d’esprit dominantes dans les société. En conséquence, « je » ne pense plus, « ils » le font pour moi, il s’ensuit que l’absence d’opinion nous sert maintenant d’opinion.
Comment y remédier ? Par la curiosité intellectuelle et par le refus du refus de penser. Sacha Guitry n’a-t-il pas dit : « Le peu que je sais, c’est à mon ignorance que je le dois » ?
Pensons parce que le non-su perpétue l’ignorance…
« Un mot est la construction d’un son et d’un sens. »…
Le manque d’éthique, et si c’était moi ?