Propos recueillis par Leïla Berrached, chargée de la Connaissance Média à l’Argus de la presse.
Bilan média 2008 vu par le pôle Etudes de l’Argus de la presse.
L’année 2008 a été mouvementée pour le monde des médias avec de nombreuses sessions, apparitions, fusions. Quel regard porter sur ces grands bouleversements qui semblent augurer une année 2009 difficile ?
Céline Rolland : « Les réorganisations au sein des groupes médias ont toujours eu un impact sur les médiatisations résultant de stratégies RP. Cet impact est d’autant plus fort dans les secteurs d’activité B to B car la faible diversité des supports concernés s’adressent essentiellement à des professionnels, et donc à un public restreint. Cette année, les restructurations et les mises en ventes observées dans le secteur de la presse devraient toutefois avoir un impact limité en termes de présence médiatique pour les marques et les entreprises.
Toutefois, nous avons assisté à des disparitions emblématiques comme Bien dans ma vie !
La disparition de Bien dans ma vie ! ne devrait pas porter à conséquences compte tenu de la bonne santé globale et de la diversité des titres féminins sur le marché français. Par ailleurs, le lancement annoncé de nouveaux supports de presse féminins haut de gamme offrira en 2009 de nouvelles opportunités de communication. S’ouvriront alors de nouvelles perspectives pour les acteurs du luxe, des cosmétiques, de la mode ou de la beauté».
Est-il approprié, avec la crise que connaît actuellement le secteur automobile, qu’un groupe comme Motor presse (déjà fortement présent sur les titres Moteurs) développe sa stratégie en prenant possession des titres loisirs du groupe Mondadori ?
Gildas Lemoigne : « Plus que la crise économique qui secoue le secteur automobile aujourd’hui, je pense que la stratégie de Motor Presse s’appuie essentiellement sur le constat d’une baisse générale des chiffres de vente de la presse magazine automobile depuis trois ans.
Cette baisse est révélatrice d’un changement profond de nos centres d’intérêt et de notre style de vie. Pollution, baisse du pouvoir d’achat, amélioration des transports alternatifs, l’automobile ne fait peut-être plus autant rêver qu’auparavant.
Serait-ce que l’automobile n’est plus considérée comme un simple bien de consommation ?
La presse automobile est avant tout une presse loisirs ou une affaire de passionnés, le rachat des titresLe Cycle, Bateaux ou L’Officiel du cycle et du quad n’est pas incohérent avec le positionnement actuel de Motor Presse. Et cela permet au groupe de presse de rester en accord avec les préoccupations des citadins qui privilégient de plus en plus les moyens de transport alternatifs ».
Les problématiques environnementales ont fortement impactées les médias. La presse déco en a largement bénéficié : elle s’est transformée en véritable boîte à outils du « vivre mieux ». Les marques ont-elles également abordé ce virage ?
Laetitia Citerne :Effectivement on entend parler d’écologie dans tous les médias, et selon moi c’est un effet boule de neige, faisant suite au Grenelle de l’Environnement.Les individus commencent à prendre conscience du « problème » mais je n’ai pas remarqué cette tendance pour les clients du secteur « déco ». Les titres « déco durable » cités semblent plutôt relever de l’habitat que de la décoration… c’est sans doute ce qui explique qu’un faible nombre de marques de décoration se soit tourné vers ces supports.
Quel est leur point de vue sur cette nouvelle thématique de presse ?
J’ai eu l’occasion de signaler cette tendance à certains clients… mais elle n’a pas suscité l’intérêt. Actuellement, les grands supports de ce secteur restent Elle Déco, Prima Maison etc. qui leur offrent une plus grande visibilité.Les supports tendance « environnementale » ou « déco durable » s’adressent avant tout à une cible bien particulière. Il est certain que les grandes marques de décoration pourraient se lancer dans le credo mais, pour le moment, leur cible demeure le grand public et notamment les magazines de décoration à forte audience.
Autre tendance relevée en 2008, une forte apparition de supports de luxe. Eric Valz décrit le luxe comme une capacité à « associer une exigence spirituelle à l’objet ». Cette description peut-elle également s’appliquer à sa presse ?
Barbara Letscher : « Les origines et l’essence même du luxe sont enfouies dans des temps immémoriaux. Envers et contre tout, alors que nombre d’experts lui prédisent un avenir maussade pour 2009, le luxe alimente encore et toujours les pages de magazines qui en 2008 comptent eux aussi une année de plus.
Est-ce que les magazines de luxe vont encore connaître de beaux jours ?
Et si le véritable luxe était de pouvoir choisir parmi cette palette de supports, tous différents les uns des autres, et si complémentaires entre eux ! …Choisir entre celui qui un jour suscite notre enthousiasme, ou l’autre qui le lendemain avive notre curiosité, ou encore celui qui sans prévenir, sait toucher notre sensibilité ? Et si le véritable luxe était dans la richesse …éditoriale ! »