Culture RP a rencontré Oriane Gérard, Community Manager indépendant
Qu’est-ce qui vous a orientée vers la profession de community manager et pourquoi choisir le côté indépendant plutôt que de travailler pour une marque en particulier?
Je suis venue par hasard au métier de CM puisqu’auparavant j’ai exercé les métiers de chargée de communication et de responsable SEO et médias sociaux. Lorsque j’ai réalisé le potentiel des médias sociaux, pour l’image d’une marque et sa relation avec ses clients, j’ai décidé de m’y intéresser de plus près et d’en faire mon métier. J’ai eu la chance d’être recrutée en tant que CM de l’agence web X-PRIME Groupe où j’ai beaucoup appris au contact des clients pour lesquels j’ai travaillés : Aéroports de Paris, Orange Business Services, GiFi, Sage France… Travailler en agence oblige à avoir de la méthodologie, de la rigueur, à switcher d’un client à l’autre avec réactivité et pertinence, à être toujours sur la brèche, au fait des évolutions du social media pour répondre au mieux aux attentes des clients et prospects. C’est très riche mais, à l’approche de mes 30 ans, j’ai eu envie de tenter l’aventure du freelance. J’ai la chance d’être identifiée comme une référente en social media à Toulouse où je vis et interviens déjà au sein d’écoles de communication (ESC, IAE, ISEG, ISCOM) : une bonne base pour me lancer ! Je conserve la richesse de travailler pour plusieurs clients aux domaines d’activité différents, ce qui, intellectuellement est très stimulant, tout en prenant le temps pour eux et en retrouvant une qualité de vie me permettant de mener à bien mes projets personnels.
Selon vous une marque de BtoB a-t-elle sa place sur les médias sociaux?
Totalement ! La cible est certes différente, le contenu aussi mais il y a énormément de contenus à valoriser. J’ai pu le constater avec Sage France : fiches produits, tutoriaux, évènements, tips, vidéos… Il y a énormément de choses à dire, à faire pour informer les communautés sur la marque et ses produits. C’est passionnant à travailler ! L’exemple de Salesforce le prouve : avec des messages ciblés selon les réseaux, une marque BtoB est légitime pour y être présente.
Quelles sont les bonnes pratiques ?
Le contenu, le contenu, le contenu : sans contenu, c’est compliqué de se positionner sur les médias sociaux. La marque peut disposer déjà de son propre contenu qu’il suffit juste ensuite d’adapter ; si elle en manque, il faut alors en créer : visuels, billets de blogs, infographies, vidéos, tuto… en gardant à l’esprit que nous avons des pros en face dont les attentes en termes de contenu sont différentes d’un consommateur lambda. Si on organise un concours sur Facebook par exemple, les goodies et lots seront différents de ceux d’une marque de grande consommation.
Si je prends l’exemple de Sage France que je connais bien pour les avoir accompagnés durant un an et demi, ils ont un contenu très riche. Au CM de l’organiser, le traiter selon un angle pertinent, proposer des contenus complémentaires. Nous avions ainsi opté pour des lignes édito distinctes entre Facebook et Twitter. Sur Facebook, sont privilégiés les contenus visuels, annonces d’évènements, relais de tutoriaux hébergés sur slideshare ou youtube, relais de la vie d’entreprise, les salariés de Sage étant fortement investis dans des causes humanitaires… Sur Twitter, est privilégiée l’expertise de marque et le relais d’actualités sur ses domaines de compétence afin de tenir informés les followers du compte des derniers articles sur le Cloud, l’ERP, leur donner des tips en matière de RH…
Autre exemple, pour un évènement : plutôt que juste l’annoncer et poster un album photo afin de le relayer, on peut imaginer des interviews vidéos des conférenciers, des prises de vue des ateliers, un relais sur slideshare des supports de présentation, des portraits des intervenants, des photos live, un livetweet d’une conférence, une infographie sur le sujet… Il faut penser global et interconnexion entre les espaces plutôt que de penser en silo et de façon indépendante. Les possibilités de communication pour une marque BtoB sur les médias sociaux sont larges, j’ai pris énormément de plaisir à travailler sur Sage France.
Ensuite, comme pour du BtoC : quelle identité construire, comment impliquer la communauté dans l’évolution de sa marque, quel discours adopter, quels réseaux privilégier…
Dans l’édition 2013 de l’étude sur les community manager en france menée par RegionJob que pensez-vous que :
1. selon 37 % des CM interrogés ceux-ci consacrent moins de 40 % de leur journée sur cette activité?
Ce chiffre est à relativiser en fonction de l’entreprise où opère le CM : en agence, c’est du 100% car, entre l’animation pure, la réponse aux AO, les reportings, les call clients, la veille, la modération des espaces… On ne manque pas d’occupation !
Dans une PME ou une start up, le CM est souvent en charge de la communication donc il doit assumer d’autres missions en parallèle du social media et répartir son temps autrement.
Enfin, tout dépend des clients pour lesquels vous travaillez : lorsque les comptes ont une partie SAV, le temps à y consacrer est plus important qu’un compte où du contenu est simplement relayé.
2. selon 66 % des personnes interrogées, ils reconnaissent à 81 % que leur travail est mieux compris depuis un an. Un métier en devenir, mais 45 % des personnes interrogées ne se voient pas encore exercer cette fonction dans cinq ans?
Il est vrai que l’on parle beaucoup du community management et que des filières se montent au sein d’écoles pour apprendre aux étudiants les bonnes pratiques. L’ESC Toulouse, où j’ai la chance d’intervenir, l’a bien compris en montant le premier M2 Community Management. Les entreprises embauchent, proposent des stages, le métier est donc plus visible et attire de plus en plus les étudiants ou les professionnels en reconversion qui, fort de leurs expériences passées en communication, y voient là un nouveau challenge.
Cependant, le métier de CM est encore flou et reste à définir : pour certains, un CM est un profil 100% opérationnel ; pour d’autres, il faut y rajouter du SEO, de la stratégie, de la formation, de l’achat média…
Pour ma part, après 3 ans d’expérience, je tends plus vers le social media management que vers le CM pur d’animation et de modération d’espaces. Il faut évoluer en fonction des usages, de ses centres d’intérêt. Le social media est un domaine mouvant où les annonceurs et les agences rivalisent d’ingéniosité pour offrir toujours plus d’expériences aux consommateurs, pour intégrer le social media aux relations avec leurs clients, pour inventer de nouvelles opérations, de nouveaux usages.
Quelles sont pour vous les bonnes pratiques qui faut adopter sur Twitter et Facebook?
Des lignes éditoriales différentes bien sûr, pour offrir aux internautes une vision kaléidoscopique de la marque et lui permettre de multiplier ses prises de parole ensuite, le respect des spécificités de ces 2 réseaux pour adapter la prise de parole : on ne communique pas pareil sur facebook, qui est un média éminemment visuel, que sur twitter, qui fait la part belle à l’info courte et synthétique
Enfin, dans tous les cas, citer ses sources, inciter à l’intéraction, être réactif et ne pas voir les réseaux sociaux comme un outil de promotion supplémentaire mais comme un véritable espace de dialogues et d’échanges pour mieux connaître ses clients, comment sa marque et ses produits sont perçus, comment les faire évoluer…
Quels sont les outils que vous utilisez dans votre activité ?
Hootsuit, Tweetdeck, les applications mobiles pour être réactive en mobilité, analytics pour mesurer le trafic apporté par les réseaux sociaux sur les sites web, bit.y pour mesurer le nombre de clics sur un lien, twitonomy pour avoir plus de stats sur un compte Twitter, wisemetrics est aussi très bien fait. Et les insights fournis bien sûr pour mes reportings !
Que pensez-vous de la notion du Big Data et que cela changera t-il dans les usages de community manager dans le futur ?
Je sus fascinée par le Big Data et les perspectives qu’il offre. Il permet de segmenter sa communauté afin de mieux la connaître, elle et ses usages. Pour un usage CM, cela permet de détecter des contenus viraux pour qu’une marque puisse se positionner de façon réactive sur la réutilisation d’un concept et génère du bouche à oreille.
Le Big Data est indissociable de la Business Intelligence dans le sens où, une fois que vous connaissez votre communauté et ses usages, vous pouvez ensuite lui soumettre des informations adaptées et pertinentes. A l’heure actuelle, je n’ai pas connaissance de l’utilisation optimale du Big Data dans le CM, même si cela me paraît être une de ses évolutions logiques.